Des négociations secrètes entre Bouteflika et Aït-Ahmed ?

L’hommage rendu à la mémoire du plus grand opposant au régime par l’Algérie officielle a de quoi intriguer les observateurs. S’agit-il d’une simple opération de récupération politicienne ? Sans doute. Mais il n’y aurait pas que cela si on s’en tient aux informations rapportées par le site français Mondafrique du 26 décembre selon lesquelles il y a bien eu tout au long de ces dernières années des négociations secrètes entre le président Bouteflika et le leader du FFS exilé en Suisse. Le président Bouteflika caressait le rêve de recevoir l’ancien dirigeant du FFS avant que la mort ne vienne mettre fin à ce rêve qui aurait aidé Bouteflika à compléter sa démarche de réconciliation nationale. « Le décès du charismatique opposant Hocine Aït Ahmed le 23 décembre dernier en Suisse a privé Abdelaziz Bouteflika d’un vieux rêve qu’il espérait toujours réaliser : recevoir au Palais Présidentiel d’El-Mouradia ou à la Résidence présidentielle de Zéralda, le plus influent des opposants algériens, le défunt leader du Front des Forces Socialistes (FFS).Un tel symbole aurait pu redorer le blason d’un Abdelaziz Bouteflika contesté et affaibli par des années de guerre contre ses ennemis au sein de l’Etat-major de l’armée et du redoutable DRS »

Citant un personnage de l’entourage du président Bouteflika, le site français révèle que c’est la position du leader du FFS devant l’arrêt du processus électoral le 11 janvier 1992 qui a rapproché Bouteflika de Hocine Aït-Ahmed. Un autre point les rapprochera encore plus : l’hostilité au pouvoir des militaires et du DRS même si les approches politiques des deux hommes étaient différentes. L’un (Bouteflika) était favorable à un changement de l’intérieur par un compromis avec une partie des généraux qui l’ont aidé à revenir au pouvoir alors que l’autre (Aït-Ahmed) continuait à exiger une démocratisation immédiate. Le site français révèle que « Dès son arrivée au sommet de l’Etat, Abdelaziz Bouteflika tente de renouer le contact. Il envoie plusieurs de ses émissaires en Suisse pour rencontrer Hocine Ait Ahmed. Ce dernier se montre intraitable et exige dès le départ des concessions de taille : juger les auteurs de l’assassinat d’Ali Mécili, commandité en 1987 par les services secrets algériens, adapter la Constitution algérienne aux valeurs de la protection des droits de l’homme, réduire le pouvoir de l’armée, etc. Au cours de ses premières années au pouvoir, Bouteflika ne peut guère donner une suite favorable à ses revendications. Il aura fallu attendre 2011 et 2012 lorsque les Printemps Arabes éclatent pour que Hocine Aït Ahmed daigne accepter des compromis. Bouteflika lui fait miroiter un cahier de réformes démocratiques et lui promet la fin du pouvoir parallèle du DRS. Soucieux de l’intégrité de l’Algérie face à l’incertitude de l’avenir, Hocine Aït Ahmed presse ses militants à participer aux élections législatives de 2012 pour entrer au Parlement et faire entendre leur voix. Un processus de négociation prend forme. Bouteflika promet aux partisans de Hocine Aït Ahmed un droit de regard sur la gestion du pays et des portefeuilles ministériels lorsqu’il liquidera définitivement les relais obscurs des généraux du DRS ».

Les promesses faites par Bouteflika au leader du FFS tarderont à se réaliser même si le site français passe sous silence plusieurs des facilités accordées ces dernières années par le pouvoir au FFS. La maladie des deux hommes ne les a pas aidés à aller jusqu’au bout de leurs négociations secrètes en vue de l’établissement d’un « Etat civil ». C’est ce qui explique peut-être l’hommage très prononcé de Bouteflika à la mémoire de Hocine Aït-Ahmed…