Les aveux de cheikh Hamad sur le rôle des pays du Golfe en Libye

Dans un entretien accordé au Financial times, l’ancien premier ministre du Qatar, Cheikh Hamad Ben Jassam a confirmé ce qu’on savait déjà à savoir que son pays était impliqué jusqu’au cou dans l’opération de déstabilisation de la Libye depuis 2011. Mais ce qui est intéressant dans cet entretien, c’est que nous apprenons de la bouche d’un ancien dirigeant qatari que les pétromonarchies du Golfe n’étaient pas sur la même longueur d’onde en Libye et c’est ce qui explique en partie que leurs ingérences contradictoires se soient soldées par un chaos indescriptible dont le peuple libyen continue de payer les frais.

Le Cheikh Hamad explique en effet le chaos qui s’est installé en Libye par le fait que « le Qatar s’est retrouvé en concurrence avec les Emirats qui soutenaient un autre groupe armé ». Résultat des courses : « Il y avait trop de cuisiniers, le plat a été gâché » ! Il est possible que ce que « nous faisions a suscité beaucoup de jalousie et d’ennemis, mais j’étais un soldat au sein du gouvernement » et l’action menée était « nécessaire » pour que le Qatar soit « reconnu politiquement et économiquement ». Les aveux de Cheikh Hamad en ce qui concerne le Libye valent également pour la Syrie puisque c’est le même scénario qui s’est reproduit dans ce pays. « Je vais dire une chose pour la première fois… Quand nous avons commencé à nous engager en Syrie, en 2012, nous avions le feu vert que c’est le Qatar qui conduit (dirige –ndlr) car l’Arabie saoudite ne voulait pas le faire à cette époque. Ensuite, il y a eu un changement dans la politique et Riyad ne nous a pas dit qu’elle nous voulait sur le siège arrière. Aussi, nous-nous sommes retrouvé en concurrence et cela n’était pas sain ».

A la question de savoir si la situation s’est répétée en Libye après la liquidation physique du colonel Mouammar Kadhafi où le Qatar et les Emirats ont soutenu des factions qui s’affrontaient, Hamad Ben Jassem répond par une conclusion : « Au final, il y avait là-bas trop de cuisiniers, c’est pour cela que le plat a été raté ». Pour rappel, l’ancien premier ministre a quitté ses fonctions depuis près de trois ans après l’abdication de Cheikh Hamad bin Khalifa Al Thani en faveur de son quatrième fils Cheikh Tamim. Visiblement, l’ancienne politique étrangère du Qatar avait fini par provoquer une crise avec les autres pays du Golfe que le nouveau dirigeant, Cheikh Tamim a essayé de gérer par une politique étrangère moins agressive. Cependant, les contradictions d’intérêts et les divergences de vues entre les pétromonarchies du Golfe concernant les différents dossiers sensibles (Syrie, Libye) n’ont pas complètement disparu et ce fait n’a malheureusement pas été suffisamment pris en compte par une diplomatie algérienne qui, malgré des positions de principes louables, semble parfois dépassée par les évènements.