L’OIM dénonce l’expulsion des migrants subsahariens

Depuis plusieurs mois, l’Algérie fait face à une campagne internationale mettant en cause l’expulsion illégale de plusieurs milliers de migrants subsahariens se trouvant sur son territoire. La reprise des interpellations de migrants subsahariens en Algérie, qui les contraignent à se cacher, a des « conséquences désastreuses » sur leur santé et leurs conditions de vie, s’est alarmé, dimanche 18 février, à Alger un collectif d’associations. « Après une vague d’expulsions massives en septembre et octobre 2017, les interpellations ont repris » en Algérie depuis le 10 février, « dans la rue et les transports en commun, mais aussi sur les chantiers de travail et dans les lieux de vie des migrants », a expliqué la Plateforme migration Algérie (PMA). Cette fois-ci, c’est au tour de l’Organisation internationale des migrations (OIM) d’accuser l’Algérie d’avoir abandonné des Subsahariens dans le désert. Selon l’OIM, l’Algérie «serait responsable de l’abandon dans le désert nigérien d’une partie des 10 000 migrants subsahariens qui s’y trouvent depuis septembre dernier et qui ont été pris en charge par l’OIM». Brandissant des photos et des vidéos, le chef de mission au Niger de l’OIM, Giuseppe Loprete, s’est même indigné du sort qui leur a été réservé en pointant la responsabilité de l’Algérie.

Les associations internationales et algériennes membres de la PMA, dont Médecins du monde, Caritas ou la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH), s’alarment des « conséquences désastreuses de ces expulsions sans distinction de nationalité » qui séparent parfois les familles et isolent des mineurs. « Face à la crainte d’être arrêtés, les migrants s’enferment dans leurs domiciles. Si les expulsions se poursuivent, les migrants se verront forcés à vivre cachés  Leur « situation sanitaire et médicale risque de devenir  rapidement préoccupante en raison de la rupture d’accès aux soins et de ravitaillement en nourriture », poursuit-elle. Selon elle, des centaines de Nigériens, Maliens, Ivoiriens, Camerounais, Libériens et Guinéens, dont des femmes enceintes et des enfants, ont été arrêtés le 10 février et transférés dans un centre de rétention de la banlieue d’Alger, avant d’être transportés en bus vers Tamanrasset, à 2 000 km au sud de la capitale, au cœur du Sahara. De là, selon les associations, ils ont été emmenés en camion le 14 février à la frontière avec le Niger, à environ 400 km plus au Sud, et ont été ensuite contraints de rejoindre « à pied, en plein désert », la localité d’Assamaka, au Niger, à une quinzaine de kilomètres de la frontière.

Les migrants en situation irrégulière en Algérie – essentiellement des ressortissants d’Afrique subsaharienne estimés à environ 100 000 par les ONG – vivent hors de tout cadre juridique et dans des conditions le plus souvent extrêmement difficiles, souvent exploités par des patrons indélicats. Plus de 2 000 Africains de divers pays subsahariens avaient été arrêtés en septembre et octobre 2017 en Algérie et expulsés vers le Niger, avait indiqué Amnesty International fin octobre, dénonçant un « profilage ethnique » et des expulsions « illégales ». Il y a quelques semaines, le ministre nigérien de l’intérieur, Mohamed Bassoum, avait dénoncé le fait que l’Algérie expulse vers le territoire nigérien des migrants subsahariens originaires d’autres pays que le Niger comme par exemple les ressortissants maliens, guinéens et sénégalais. Les observateurs interrogés estiment que la question migratoire constitue un véritable défi  pour l’Algérie sur les plans économique, social et sécuritaire mais qui doit être néanmoins pris en charge dans le respect scrupuleux des droits de l’Homme et des engagements internationaux de l’Algérie pour ne pas donner prise aux critiques malveillantes de certaines ONG dont les mobiles ne sont pas toujours aussi innocents qu’elles prétendent.