L’Onu censure un rapport accusant l’Etat d’Israël d’apartheid

Sous la pression des Etats-Unis et d’Israël, le secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres,  a malheureusement décidé de censurer un rapport officiel accusant Israël d’apartheid. Le rapport en question a été rédigé par deux spécialistes en droit international, les professeurs américains Richard Falk et Virginia Tilley, et a été rendu public sur le site de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale ( Economic and social commission of western Asia- ESCWA , une des cinq organisations régionales de l’Onu).  Après analyse des multiples discriminations dont sont l’objet les Palestiniens, le rapport en question conclut qu’« Israël est coupable de politique et de pratiques constitutives du crime d’apartheid » et appelle les pays membres des Nations Unies à soutenir la campagne internationale Boycott, désinvestissement et sanctions qui prône le boycottage de l’Etat d’Israël.

Suite à l’intervention du SG de l’Onu en vue de retirer le document du site de l’ESCWA, la secrétaire exécutive de cette dernière, la Jordanienne Rima Khalaf, a présenté sa démission comme un acte de protestation contre les pressions de M. Guterres « Il m’a demandé hier matin de retirer [le rapport], je lui ai demandé de repenser sa décision mais il a insisté. Sur ce, je lui ai présenté ma démission de l’ONU. Je démissionne parce qu’il est de mon devoir de ne pas dissimuler un crime, je soutiens toutes les conclusions du rapport. » Cette économiste de formation âgée de 63 ans, fut ministre de la planification et premier ministre adjoint du royaume de Jordanie dans les années 1990, avant de  faire carrière aux Nations Unies. Au sein de l’organisation internationale, elle a notamment contribué au premier rapport sur le développement humain dans le monde arabe, en 2002, une étude qui a fait date. « Sa démission est un choc, mais la plupart d’entre nous sommes fiers d’elle, confie une source au sein de l’ESCWA, sous couvert d’anonymat. C’est ce qu’elle pouvait faire de mieux. Elle proteste contre un acte de censure qui va à l’encontre de tous les principes des Nations unies. »

Depuis l’abandon par l’Onu de la résolution assimilant le sionisme à un racisme, c’est la première fois dans l’histoire de l’ONU qu’un rapport publié en son nom accuse l’Etat hébreu d’apartheid. Le terme revient pourtant régulièrement, depuis une dizaine d’années, dans le débat sur la politique d’occupation israélienne. L’ancien président américain Jimmy Carter l’avait employé dans un livre qui avait fait beaucoup de bruit à sa sortie, en 2006, intitulé Palestine : Peace, not Apartheid (Palestine : la paix, pas l’apartheid). A l’époque, l’ancien architecte de la paix de Camp David, entre Israël et l’Egypte, avait estimé que les pratiques israéliennes dans les territoires occupés étaient « pires que l’apartheid en Afrique du Sud». En 2014, John Kerry alors chef de la diplomatie américaine, avait prévenu que l’Etat hébreu risquait de devenir « un Etat d’apartheid », si une solution au conflit israélo-palestinien n’était pas trouvée rapidement. Dans la société civile internationale, le mouvement BDS qui milite pour le boycott de l’Etat raciste d’Israël n’hésite pas à assimiler les pratiques discriminatoires de l’Etat d’Israël à l’égard des Palestiniens à la politique du régime d’apartheid.