Les Algériens manifestent en masse contre le cinquième mandat
Pour le troisième vendredi consécutif, les Algériens sont descendus massivement dans la rue pour dire non au cinquième mandat et pour exprimer leur aspiration au changement. Première constatation : Les manifestations ont touché pratiquement l’ensemble du territoire national du nord au sud et de l’est à l’ouest : A Alger, Oran, Constantine, Tlemcen, Sidi Bel Abbes, Saïda, Bechar, Adrar, Tipaza, Sétif, Tizi Ouzou, Bejaïa, Batna, Biskra, El Oued, Ouargla, Ghardaïa, Skikda, Guelma, Ain Mlila. Seconde constatation : les manifestations ont su garer leur caractère organisé et pacifique. Aucun dérapage n’a été signalé mis à part un petit incident à Alger du à l’action de quelques dizaines de casseurs qui ont cherché à prendre d’assaut le Musée des arts islamiques mais ils ont été empêchés par les manifestants, ce qui a obligé les forces de l’ordre à intervenir. Troisième constatation, le professionnalisme dont continuent à faire preuve les forces chargées de la sécurité et de la protection civile.
Le fait que les manifestations du vendredi 8 mars aient coïncidé avec la célébration de la Journée internationale de la femme explique sans doute la présence remarquée de l’élément féminin. Cela a contribué à consolider le caractère presque familial de la mobilisation que les observateurs avaient déjà remarqué le vendredi dernier. Ce facteur ne peut que renforcer, selon es observateurs,le caractère pacifique du mouvement. Les médias internationaux qui ont couvert les manifestations contre le cinquième mandat sont d’ailleurs unanimes à reconnaître ce caractère hautement pacifique. La manifestation dans la capitale a connu la participation de plusieurs personnalités politiques. Mais la présence de certaines figures politiques n’a pas été du goût des manifestants à certains endroits. C’est ainsi que le candidat Ali Ghediri a été sommé de quitter la manifestation. Pour le second vendredi consécutif, la présidente du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune, a été chassée par les manifestants. Des jeunes manifestants ont expliqué leur comportement en affirmant qu’ils tenaient à préserver le caractère « apolitique » de leur mouvement.
Pour les observateurs, cette méfiance viscérale des jeunes manifestants à l’égard des dirigeants politiques, plus ou moins impliqués dans la politique des deux dernières décennies, illustre le divorce existant entre la jeunesse algérienne et les partis politiques, y compris ceux qui s’autoproclament « démocrates ». Par ailleurs, les observateurs insistent sur la grande diversité politique du mouvement populaire à travers le territoire national. Si par exemple dans les wilayas de Bouira et de Tizi Ouzou, le drapeau berbériste inventé par le sioniste Jacques Bennet côtoie le drapeau national, dans d’autres wilayas de l’est et de l’ouest, comme à Oran et El Oued, le drapeau national côtoie le drapeau palestinien. Dans la wilaya de Guelma, les manifestants, qui se sont dirigés vers la stèle érigée à la mémoire du défunt Houari Boumediene, n’ont pas hésité à établir un rapport direct entre le pouvoir corrompu et l’influence française, une des banderoles indique « Nous réclamons l’expulsion de la bande de suceurs du sang du peuple qui a vendu le dépôt des chouhadas à la France »
Mustapha Senhadji