La maison d’édition Frantz Fanon mise sous scellés par les services de la wilaya de Boumerdès
21.01.2025. La maison d’édition Frantz Fanon, dirigée par le journaliste Amar Inegrachen, a été mise sous scellés par les services de la wilaya de Boumerdès, a indiqué l’éditeur sur sa page Facebook. Cette décision qui fait suite à la mise sous contrôle judiciaire du responsable de la maison d’édition risque d’être perçue comme une nouvelle atteinte aux libertés dans notre pays.
Selon un communiqué de presse partagé sur la page officielle des éditions Frantz Fanon, la fermeture est prévue pour une période de six mois. « C’est un scellé de la wilaya apposé sur la porte depuis le 14 janvier 2025 », indique la même source. Les autorités ayant sanctionné la maison d’édition expliquent que cela fait suite à l’« édition d’un livre dont le contenu porte atteinte à la sécurité et à l’ordre public ainsi qu’à l’identité nationale et colporte un discours de haine ». Il s’agit du livre de Hédia Bensahli, « L’Algérie juive – L’autre moi que je connais si peu« .
Le responsable de cette maison d’édition est déjà « mis sous contrôle judiciaire pour les mêmes motifs ». Le mois d’octobre dernier, des informations avaient indiqué que l’éditeur avait été placé en garde à vue suite à la publication du même livre. À rappeler que les éditions Frantz Fanon ont été exclues du Salon du livre SILA 2024 dans un contexte où la répression cible la culture en Algérie. La librairie Chikh a été fermée le 9 décembre 2024 par la police à Tizi Ouzou. Selon son propriétaire, Omar Chikh, la fermeture a été officiellement motivée par l’absence de la mention « ventes dédicaces » sur son registre de commerce. Pour rappel, la Maison d’éditions Frantz Fanon est une maison est connue pour une ligne éditoriale berbériste. Elle a notamment publié Said Sadi. Et pour éviter toute confusion, rappelons qu’elle n’a rien à voir avec l’Institut Frantz Fanon, un centre de recherche et d’information qui se distingue par sa ligne anti-impérialiste et anti-sioniste tranchée.
A un moment où notre pays fait face à une campagne de désinformation et de déstabilisation émanant des milieux néocolonialistes et sionistes en France, cette décision risque de donner du grain à moudre à tous les détracteurs de l’Algérie qui vont crier à la violation des libertés démocratiques. La publication d’un ouvrage avec un titre aussi provocateur en pleine guerre génocidaire à Gaza constitue une offense à l’opinion publique algérienne et risque de porter atteinte à la cohésion nationale et à l’ordre public. Par conséquent, cet acte répréhensible tombe sous les coups de la loi algérienne. Cependant, le juste équilibre entre le respect de la liberté et la protection de la société contre les entreprises de déstabilisation recommande des mesures proportionnées. Une interdiction du livre, motivée par la Justice, aurait suffi. Plus important, cette interdiction doit être accompagnée d’un débat sérieux au sein de la société civile en vue de renforcer l’immunité intellectuelle de la société algérienne contre de telles dérives.
Mohamed Merabet