La révocation du général M’henna Djebbar augure-t-elle de changements à la tête d’autres institutions ?
26.09.2024. En l’absence d’une communication officielle professionnelle et crédible, la révocation du Directeur général de la Documentation et de la Sécurité Extérieure (DDSE), le général-major M’henna Djebbar, continue de susciter les interrogations. S’agit-il d’un épisode de la lutte des clans au sein du pouvoir comme le prétendent certains youtubeurs en mal de sensation ou ne s’agit-il que d’une succession ordinaire à la tête d’un corps d’Etat comme le prétend la propagande officielle ?
Par Mohamed Merabet
La révocation du Directeur général de la Documentation et de la Sécurité Extérieure (DDSE), le général-major M’henna Djebbar et son remplacement par le général Fethi Moussaoui, ont été l’occasion pour les détracteurs de l’Etat algérien, de lancer une nouvelle campagne de désinformation et de déstabilisation des institutions algériennes.
Malheureusement, la responsabilité de cette déplorable situation incombe avant tout au pouvoir incapable de se doter d’un appareil de communication moderne et crédible. En effet, il est triste de voir que les Algériens ont été informés de ce changement à la tête de la DDSE par des « journalistes » basés à l’étranger dont les liens avérés avec les services makhzéniens ne font aucun doute, et ce, plusieurs jours avant que les médias officiels ne donnent l’information.
Les images officielles de la cérémonie d’installation du nouveau patron de la DDSE par le chef d’état-major de l’ANP, le général d’armée Said Chanegriha, avaient pour but de présenter l’évènement comme une succession ordinaire à caractère administratif. La manoeurvre ne trompera personne. Ce n’est pas un hasard si la révocation du général-major M’henna Djebbar est survenue deux semaines après le cafouillage qui a caractérisé l’annonce des résultats de l’élection présidentielle.
Quels que soient les résultats réels de cette élection, il est clair qu’une partie a cherché à discréditer l’opération électorale dans le but d’affaiblir le président de la république. Quel que soit le rôle supposé du général-major M’henna Djebbar dans cette crise, sa révocation s’inscrit dans une opération de reprise en mains des affaires de l’Etat par le camp présidentiel. Il n’est pas exclu non plus que le général-major M’henna Djebbar ait payé d’autres factures en rapport avec son implication dans plusieurs dossiers sensibles de politique extérieure.
Le président de la république est dans son droit quand il décide de remplacer le Directeur général de la Documentation et de la Sécurité extérieure. Et étant donné la sensibilité du poste en question, la présidence n’a pas à s’expliquer sur les motifs de sa décision qui relèvent dans ce cas du secret défense. Cependant, nous sommes en droit de nous demander si cette décision était uniquement motivée par des considérations de service et si elle n’a pas été aussi dictée par des motifs plus politiques et qui se rapportent à ce qu’on désigne habituellement par l’expression « lutte des clans au sommet du pouvoir ».
En tout état de cause, plusieurs questions restent en suspens. La révocation d’un général qui était réputé proche de la mouvance de l’ancien patron de l’ex-DRS,le général Toufik, signifie-t-elle un affaiblissement de cette dernière ? Si elle n’a pas reçu au préalable l’aval du chef d’état-major de l’ANP, comme le soulignent certains observateurs avertis, comment la révocation de M’henna Djebbar aurait-elle été possible sans le soutien actif d’autres centres de pouvoir, au sein de l’état-major, de la sécurité présidentielle et de la garde républicaine ? La chute de M’henna Djebbar, qui était jusque-là, un des hommes forts du régime, sera-t-elle suivie de la chute de ses alliés et des hommes qu’il a placés un peu partout dans les appareils administratifs, économiques et médiatiques ?
Le semaines et mois qui viennent nous donneront peut-être quelques réponses à ces questions. En attendant, il est important de rappeler qu’au delà des luttes de clans et de personnes, le plus important reste le fonctionnement des institutions de l’Etat au service des intérêts supérieurs du pays. L’opinion publique algérienne n’a que faire de qui fait quoi à la tête de telle ou telle institution. La question la plus importante reste aujourd’hui : les intérêts du pays et des citoyens sont-ils correctement défendus et préservés ? Cette question appelle logiquement une autre : les hommes appelés à diriger les corps constitués de l’Etat ont-ils la compétence nécessaire pour la fonction ?