Lavrov à Alger : un signal diplomatique fort

Par Mohamed Merabet

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est arrivé à Alger ce lundi 9 mai dans la soirée pour une visite de deux jours au cours de laquelle il discutera avec les responsables algériens de la visite à Moscou du président Abdelmadjid Tebboune auquel il remettra en audience une invitation officielle de son homologue russe Vladimir Poutine. Cette visite a été programmée suite à l’entretien téléphonique entre Tebboune et Poutine le 18 avril dernier, a indiqué une source diplomatique. Outre la préparation de la visite de Tebboune à Moscou, les questions relatives aux relations bilatérales et au partenariat économique, les crises régionales telles que celle en cours en Libye et au Mali ainsi que la question du Sahara Occidental, seront au centre des discussions entre Lavrov et son homologue Ramtane Lamamra, Les deux délégations devraient également préparer la réunion de la 10e session de la commission mixte du partenariat économique qui était prévue en 2021 mais qui a été reportée en raison de la pandémie de Covid-19. La question de la guerre en Ukraine sera aussi  évoquée entre les responsables algériens et russes au cours de cette visite. La situation en Ukraine qui pèse lourdement sur la situation économique des pays arabes notamment en matière d’approvisionnement en céréales, constitue comme on le sait un sujet particulièrement préoccupant en raison de son incidence directe sur la paix mondiale.

Si l’on s’en tient aux déclarations du ministre russe à Alger, un nouveau document stratégique interétatique pourrait être signé à l’issue de cette visite. “C’est un plaisir d’être de retour dans l’hospitalière Algérie et de poursuivre nos contacts étroits sur les questions clés de l’agenda bilatéral et du dialogue international régional”, a indiqué le chef de la diplomatie russe, selon un communiqué de son département. “Toutes ces années, a poursuivi le ministre russe, nous avons activement développé un dialogue politique, développé des liens commerciaux, économiques, de coopération militaro-technique, humanitaires et culturels…”. Mais “Face au développement rapide de relations amicales et étroites dans tous les domaines,  nous avons soutenu l’initiative de nos amis algériens d’élaborer un nouveau document stratégique interétatique qui reflétera la nouvelle qualité du partenariat bilatéral”, a fait savoir Lavron.

En recevant Lavrov en pleine guerre en Ukraine, L’Algérie sait pertinemment qu’elle risque d’être pointée du doigt par certaines puissances occidentales qui font pression sur les pays du sud pour qu’ils s’alignent sur les positions américaines dans le dossier ukrainien. Mais l’Algérie qui plaide pour un règlement diplomatique du conflit en cours en Ukraine refuse de se laisser entraîner dans une politique de belligérance contraire à ses principes et à ses intérêts.. Elle a refusé de souscrire aux sanctions imposées à la Russie par l’assemblée générale de l’ONU comme elle a refusé la suspension de la Russie du Conseil des droits de l’Homme. L’Algérie avait a pris part  le 5 avril dernier à Moscou à une mission de bons offices dans le cadre du groupe de contact arabe qui a rassemblé les ministres des Affaires étrangères de la Jordanie, du Soudan, de l’Irak et de l’Egypte, en sus du Secrétaire général de la Ligue arabe, afin de lancer des concertations avec la partie russe et de contribuer à trouver une solution diplomatique à la crise ukrainienne. En recevant Lavrov, Alger vient d’envoyer à ses partenaires un signal diplomatique fort. L’Algérie refuse de se faire dicter sa politique étrangère par qui que ce soit. Tout en défendant une neutralité positive face à un conflit qui risque de dégénérer en guerre mondiale, l’Algérie cherche avant tout à préserver ses intérêts stratégiques nationaux parmi lesquels figure bien entendu la stabilité de son partenariat technico-militaire avec la Russie.