Les « éradicateurs » profitent des inepties de Rachad pour se repositionner

Des activistes liés aux réseaux de la mouvance de l’ex-FIS regroupés au sein de l’organisation Rachad et des Frères musulmans ont commencé ces dernières semaines à élever la voix et n’hésitent pas à appeler à la radicalisation du Hirak. Ils n’excluent plus désormais la possibilité de « s’autodéfendre » contre ce qu’ils appellent la répression du pouvoir algérien, ce qui sous-entend une nouvelle orientation vers l’emploi de moyens violents et ce, après avoir constaté leur échec politique et notamment leur incapacité à empêcher l’élection présidentielle du 12 décembre dernier. Les appels sur Youtube émanant d’un activiste lié à la mouvance de Rachad installé à Istanbul ne permettent aucun doute à ce sujet.

La radicalisation des réseaux islamistes est une aubaine pour le pouvoir qui n’hésite pas à pointer du doigt ces provocations médiatico-politiques et à les utiliser pour reporter la mise en oeuvre des réformes promises en exploitant notamment les contraintes réelles imposées par la crise sanitaire et la crise pétrolière. Mais ce n’est pas tout. Selon nos sources, le durcissement du discours des activistes de Rachad et la récente brouille avec leurs alliés d’hier, les berbéristes et autres pseudo-démocrates, sont une occasion en or pour le retour au sein des appareils d’Etat d’un certain nombre de responsables civils et sécuritaires connus pour leur proximité avec les clans dits « éradicateurs » dont la capacité de nuisance a été amoindrie à certains moments sous le régime de Bouteflika mais sans disparaître complètement. Les analystes interrogés insistent sur le fait que ces clans sont eux-mêmes liés à la mafia politico-financière dont certaines têtes sont tombées mais qui est loin d’avoir été éradiquée puisqu’elle continue de sévir et de saboter toute tentative de réforme politique et économique sérieuse susceptible de remettre en question ses privilèges et autres passe-droits.

Ces clans qui bénéficient toujours de positions importantes au sein des appareils de l’Etat et des entreprises publiques peuvent également compter sur leurs cousins et amis au sein de l’opposition franco-berbériste regroupée au sein de la PAD (les partis de la soi-disant alternative démocratique, des partis à majorité kabyle qui utilisent la rhétorique démocratique et laïque pour cacher leur régionalisme et leur inféodation à la France). C’est ce qui explique que certains youtubeurs connus pour leurs liens avec ces clans sont montés récemment au créneau pour dénoncer les « complots » du réseau Rachad et de ses sponsors turcs et qataris en feignant d’oublier qu’ils ont eux-mêmes utilisé la violence pour empêcher- en vain- leurs compatriotes de voter en décembre dernier et que leurs parrains au sein du pouvoir ne sont que les fourriers du néocolonialisme français en Algérie. De nombreux jeunes internautes algériens semblent de plus en plus conscients de la nuisance politique que représentent ces deux courants apparemment opposés mais qui cherchent, chacun à sa manière, à détruire l’Etat national algérien et ses symboles. Ces jeunes qui luttent pacifiquement pour un véritable changement démocratique ont compris que ce changement passe nécessairement par la réappropriation des appareils de l’Etat par les représentants authentiques de la majorité populaire qui continue de subir malheureusement le diktat d’une minorité qui a lié son sort à celui de l’hégémonie française en Algérie.

Mohamed Merabet