Mohamed Betchine répond aux accusations de Khaled Nezzar

Dans un entretien au quotidien Echorouk, l’ancien ministre de la défense nationale, le général à la retraite Khaled Nezzar, est revenu sur les évènements douloureux d’octobre 1988. Alors qu’il était chargé par le président Chadli de diriger les opérations de maintien de l’ordre dans la capitale et qu’à ce titre il était le premier responsable des actes commis par les forces de l’ordre, Khaled Nezzar n’a pas hésité à accuser l’ancien général à la retraite et conseiller du président Zeroual, Mohamed Betchine, d’être impliqué, aux côtés de l’ancien wali de Tipaza et gendre du président Chadli, dans les actes de torture perpétrés par les services de sécurité militaire dans une caserne de Sidi Fredj.

Mohamed Betchine a tenu à réagir sur les mêmes colonnes du quotidien Echorouk en rejetant les accusations de Khaled Nezzar. Dans son argumentaire, Mohamed Betchine affirme que durant les évènements d’octobre 1988, il était sous les ordres de Khaled Nezzar et qu’il n’avait été nommé à la tête de la Direction générale de la documentation et de la sécurité (DGDS) que le 29 d’octobre 1988 donc après la fin des évènements en question. A l’époque, la DGDS était accusée par certains d’être à l’origine des actes de torture incriminés et c’est ce qui explique le limogeage de son chef, le général Lakehal-Ayat. D’autres sources affirment que les actes de torture ont été perpétrés dans les locaux de la Sécurité de l’armée (SA).

Quoiqu’il en soit de la valeur des témoignages livrés par les anciens généraux Nezzar et Betchine sur ce moment douloureux de l’histoire algérienne, les observateurs s’interrogent sur la résurgence de cette polémique à ce moment précis. Sans doute, y-a-t-il un rapport entre cette polémique et la lutte pour le pouvoir qui fait rage entre les différents clans dans le cadre de la course pour la succession présidentielle. L’ancien général Betchine se serait allié au clan Bouteflika par opposition aux clans emmenés par les généraux Toufik et Nezzar qui se sont d’ailleurs rapprochés ces derniers mois. Les observateurs rappellent à ce titre l’opposition sourde qui a toujours existé entre Mohamed Betchine qui est un ancien officier de l’armée de libération nationale (ALN) aux officiers déserteurs de l’armée française, les fameux DAF dont sont issus les architectes du coup d’Etat du 11 janvier 1992, les généraux Nezzar, Lamari, Touati et Aït-Abdeslam.

Cette opposition prendra une tournure particulière durant la crise des années 90 quand le président Zeroual et son conseiller Mohamed Betchine ont vu leurs pourparlers avec les dirigeants emprisonnés du FIS (Abassi Madani et Ali Belhadj) torpillés par les généraux Toufik et Lamari. Le clivage qui a toujours existé au sein de la classe politique et de l’armée entre partisans et adversaires de la « réconciliation nationale » cache selon les observateurs d’une part une lutte pour le pouvoir et d’autre part une lutte à caractère idéologique et culturel entre deux visions de l’Algérie : une Algérie arabo-musulmane fière de ses racines amazighes et de sa diversité culturelle et une « Algérie algérienne » dans laquelle la revendication berbère apparaît comme un cache-sexe pour liquider l’héritage arabo-musulman, permettre au français de reconquérir son statut de langue dominante et réintégrer définitivement l’Algérie à la sphère d’influence néocoloniale française.