Quand Chakib Khelil voulait dénationaliser les hydrocarbures

Si le retour de l’ancien ministre de l’énergie Chakib Khelil en toute quiétude semble à première vue l’innocenter contre les accusations qui étaient lancées contre lui dans l’affaire Sonatrach et si comme l’a rappelé tout récemment Ahmed Ouyahia il n’existe aucune preuve pouvant lui faire endosser une quelconque responsabilité pénale dans ce scandale, il en va tout autrement sur le plan politique. L’ancien ministre de l’énergie est personnellement responsable de la tentative de dénationalisation des hydrocarbures qui a été sanctionnée par la loi de 2005, une loi votée par les béni oui-oui de l’APN mais qui sera abrogée un an plus tard par ordonnance présidentielle sous la pression des forces patriotiques au sein de l’Etat et dans la société civile.

Dans un ouvrage d’entretien avec Mohamed Chafik Mesbah sous le titre « Question d’Etat » paru en 2009 à Casbah éditions (Alger), l’ancien premier ministre Sid-Ahmed Ghozali est revenu sur cet épisode aujourd’hui oublié. « La loi de 2005 est une loi de dénationalisation qui ne dit pas son nom. Elle abroge une loi fondamentale, celle d’avril 1971 sans la viser ni la nommer, ce qui est déjà une illégalité majeure en soi ; l’abandon en cachette du contrôle national sur toute la chaîne des hydrocarbures, d’amont en aval, était noyé à dessein dans soixante pages de texte » affirmait Sid-Ahmed Ghozali qui ajoutait : «  C’était une loi dangereuse et nuisible, dans le fond et dans la forme, qui ne signifiait rien d’autre que le retour à la situation d’avant 1971, quand les sociétés étrangères dominaient l’exploitation du sous-sol algérien. A la limite, c’était plus grave que la privatisation de Sonatrach envisagée dans un premier temps ».

Sid-Ahmed Ghozali estimait que la loi de 2005 proposée par Chakib Khelil « instaurait le régime le plus libéral au monde, au risque de provoquer l’éclatement de la solidarité entre les pays membres de l’OPEP…L’Algérie allait être le seul pays de l’OPEP à ne plus exiger une participation majoritaire de l’Etat sur les gisements à découvrir. Les Etats de la péninsule arabique, alliés des USA les plus proches, n’ont jamais songé à renoncer au contrôle de l’exploitation de leurs gisements ». Dès que le gouvernement avait soumis en 2005 le texte du projet de loi au parlement, Sid-Ahmed Ghozali avait alerté les députés dans une lettre ouverte : « Le projet de loi nous ramène à la situation d’avant 1971, immédiatement pour ce qui concerne les futures réserves découvertes, à terme pour ce qui concerne la globalité de nos réserves. C’est une dénationalisation rampante ».