L’Algérie réclame la restitution des crânes de ses résistants
L’Algérie a demandé officiellement à la France la restitution des crânes de ses résistants, conservés depuis près de deux siècles au musée de l’Homme de Paris, et la récupération des archives de 1830 à 1962, a-t-on appris vendredi auprès de l’ambassade d’Algérie en France. A cet effet, l’ambassadeur Abdelkader Mesdoua a été chargé par le ministre des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel, d’effectuer une démarche auprès des autorités françaises au sujet de ces deux dossiers liés à la question mémorielle. Cette démarche, rappelle-t-on, fait suite à l’entretien à Alger, le 6 décembre dernier, du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, avec son homologue français Emmanuel Macron qui effectuait une visite de travail et d’amitié en Algérie. La question de la mémoire entre les deux pays a été ainsi un des points de l’entretien des deux chefs d’Etat au cours duquel le président Macron avait annoncé que la France était prête à restituer à l’Algérie les crânes de ses résistants et lui livrer des copies des archives concernant l’Algérie de 1830 à 1962.
Dans ce cadre, deux demandes ont été adressées mercredi dernier au ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a-t-on indiqué de même source, précisant que la demande sur la restitution des crânes a été cosignée par le ministre des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel, et le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, alors que celle concernant les archives elle a été signée par M. Messahel. Lors de sa visite en France dans le cadre de la tenue à Paris du Comité intergouvernemental de haut niveau (CIHN), le Premier ministre Ahmed Ouyahia avait salué, le 7 décembre, cette « percée » dans ce dossier sensible de la mémoire franco-algérienne, indiquant, dans une conférence de presse que les deux pays vont continuer à discuter à propos de la restitution graduelle des archives. Pour rappel, trois sous-commissions ont été mises sur pied pour le traitement de la question mémorielle. Des discussions sont engagées depuis plus d’une année autour de la restitution des archives, l’indemnisation des victimes algériennes des essais nucléaires et les disparus algériens durant la guerre de libération nationale.
Si la demande officielle de la restitution des crânes des résistants ne peut que satisfaire les citoyens algériens, il n’en reste pas moins que de nombreux citoyens se posent la question pourquoi le gouvernement algérien a-t-il attendu ce jour pour effectuer cette demande ? Sans diminuer l’importance symbolique que revêt ce dossier, des observateurs n’écartent pas le fait que la demande algérienne coïncide également avec d’autres motifs de discorde entre les deux pays, sur d’autres sujets qui touchent aussi bien le statut de la communauté algérienne en France que les intérêts économiques de la France en Algérie sans parler des options divergentes que les deux pays continuent d’avoir sur plusieurs dossiers diplomatiques sensibles (Libye, Sahel, Sahara occidental). A cet égard, plusieurs sources diplomatiques rappellent l’échec de la dernière visite du président Emmanuel Macron à Alger puisque ce dernier n’a pas réussi à arracher les concessions politiques et diplomatiques qu’il espérait à ses interlocuteurs algériens.