Les ambiguïtés de la France en matière de lutte antiterroriste
Au moment où le gouvernement français vient de lancer une vaste opération sécuritaire contre la mouvance islamiste radicale sur son territoire à la suite de l’attentat terroriste qui a coûté la vie à un professeur de collège français, des observateurs s’interrogent sur la politique française en matière de lutte contre le terrorisme. En effet, le discours du président français, Emmanuel Macron, annonçant son plan de lutte contre le « séparatisme islamique » et la dernière opération lancée par la police française contre les réseaux salafistes en France ont eu lieu curieusement quelques jours après la libération de quatre otages, dont une ressortissante française, qui étaient détenus par un groupe terroriste au Mali. Les conditions qui ont entouré cette libération sont restées secrètes jusqu’à ce jour. Mais ce qu’on sait de sûr c’est que les otages ont été relâchés contre la libération de près de 200 djihadistes qui étaient dans les geôles de l’armée malienne. Outre ce fait, des sources citées par des médias français ont révélé que les services français qui ont négocié cette libération ont par ailleurs versé une rançon au groupe terroriste qui détenait ces otages. Une rançon estimée à plusieurs « millions d’euros ».
Selon plusieurs observateurs, cet évènement n’a pas manqué de créer une vive tension entre Paris et Alger comme l’ont illustré des déclarations de hauts responsables algériens qui ont dénoncé le paiement de rançons aux groupes terroristes. Ces déclarations n’ont pas visé directement le gouvernement français mais tout le monde a compris de qui il s’agissait. La récente visite du ministre français des affaires étrangères à Alger s’inscrit dans ce cadre et visait à rassurer le gouvernement algérien. Ce dernier n’a pas caché ses inquiétudes de voir les terroristes libérés et l’argent versé aux terroristes servir à alimenter des actions visant le territoire algérien et l’a fait savoir à ses interlocuteurs français. D’ailleurs, il n’aura pas fallu attendre longtemps pour voir les effets désastreux de la politique française au Mali. Quelques jours après la libération des otages et des terroristes, deux attentats terroristes ont eu lieu au Mali faisant 12 victimes parmi les soldats de l’armée malienne.
Ces évènements ne manquent pas de susciter les interrogations des observateurs qui suivent de près l’évolution de la situation sécuritaire dans la région. Le gouvernement français prétend lutter contre le terrorisme mais ses services n’hésitent pas à négocier la libération de 200 terroristes au Mali et à payer plusieurs millions d’euros à des groupes terroristes dangereux. Par ailleurs, les attentats de ces dernières années sur le territoire français continuent de susciter des interrogations et des doutes. Des terroristes sont trop souvent exécutés par les forces de l’ordre alors qu’ils pouvaient être neutralisés et arrêtés. On apprend également que souvent ces « terroristes » étaient « connus et suivis » par les services de renseignement quand ils n’étaient pas tout simplement « en lien » avec eux. A ces faits troubles, s’ajoute le fait que les attentats terroristes perpétrés en France sont utilisés systématiquement par la droite et l’extrême-droite françaises pour amplifier le climat islamophobe en France et prôner une politique sécuritaire liberticide qui inquiète de nombreuses associations de défense droits de l’Homme. Ces dernières comprennent la nécessité de mesures visant à prévenir et réprimer les actions terroristes mais estiment que ces mesures ne doivent pas outrepasser le cadre légal et les garanties prévues par l’Etat de droit et les conventions internationales et européennes signées et ratifiées par la France.
Mohamed Merabet