L’absence de Tebboune et la présence de Zelensky au Sommet arabe de Djeddah créent le buzz

20.05.2023. Manifestement le président ukrainien Volodymyr Zelenski a volé la vedette au président syrien Bachar Al Assad lors du 32e sommet arabe qui s’est tenu hier à Djeddah en Arabie saoudite. La présence du président ukrainien à ce sommet n’est pas passée inaperçue et a fait couler beaucoup d’encre en suscitant notamment des questions sur la signification politique et diplomatique d’un tel évènement.

L’invitation du président ukrainien qui a été cachée jusqu’au dernier moment par le pays organisateur et qui a été ébruitée la veille par des médias algériens, semble avoir été prise par les autorités saoudiennes sans consultation préalable des autres pays participants au sommet. Ce geste unilatéral de la part de l’Arabie saoudite n’a visiblement pas été du goût de tout le monde, ce qui explique que le ministre saoudien des affaires étrangères, Fayçal Ben Ferhane, a du se justifier lors de la conférence de presse qui a suivi la clôture des travaux du sommet en affirmant que son pays était à l’initiative de cette invitation et que celle-ci s’inscrivait dans le cadre d’une « volonté d’entendre toutes les parties ». Sur le fond, l’invitation du président ukrainien sonne comme une opération de séduction diplomatique en direction de Washington de la part de l’Arabie saoudite, après le rapprochement avec la Russie, la Chine et l’Iran et la réconciliation avec la Syrie, autant d’évènement qui avaient jeté un froid dans les relations saoudo-américaines.

La présence du président ukrainien au sommet arabe de Djeddah a coïncidé avec l’absence fort remarquée du président algérien qui a délégué à sa place le premier ministre Aïmene Benabderahmane. Des médias spécialisés dans la désinformation ont saisi cet évènement pour tenter de nuire à l’Algérie en faisant croire que l’absence du président Tebboune au Sommet arabe de Djeddah était liée au fat que le prince Mohamed Ben Salmane a décidé d’inviter le président ukrainien Zelensky à la séance d’ouverture du Sommet. En faisant circuler cette rumeur, les médias en question cherchent à perturber les relations de l’Algérie avec les puissances occidentales qui soutiennent l’Ukraine dans sa guerre contre la Russie. Il faut reconnaître que cette version malintentionnée a été malheureusement alimentée par la virulente campagne anti-saoudienne lancée, la veille, par trois médias algériens (El Khabar, Le Soir d’Algérie, L’expression) à l’instigation des services de renseignement qui sont tombés dans le piège consistant à entretenir l’amalgame sur les véritables positions diplomatiques de l’Algérie sur une question aussi sensible et aussi délicate, positions fondées sur le non-alignement et l’attachement au droit international et que le président Tebboune ne cesse de réaffirmer lors de ses sorties médiatiques.

Dans la réalité, la décision du président Tebboune de ne pas assister au Sommet de Djeddah avait été prise bien avant que le prince héritier saoudien décide d’inviter le président ukrainien. Comment expliquer dès lors l’absence du président Tebboune au Sommet arabe de Djeddah ? Deux raisons sont avancées par les observateurs. La première relève de l’attachement de l’Algérie au respect du principe de la réciprocité dans les relations internationales; On se rappelle que lors du sommet arabe d’Alger tenu en novembre dernier, le prince saoudien a brillé par son absence et la raison médicale invoquée officiellement pour justifier cette absence n’avait pas convaincu Alger. La seconde raison se rapporte au geste inamical du prince saoudien qui s’est gardé d’inviter l’Algérie, à la réunion consacrée à la question de la réadmission de la Syrie au sein de la Ligue arabe. C’est assez pour justifier le fait que le président Tebboune ne se soit pas déplacé à Djeddah. En réagissant ainsi, l’Algérie a montré qu’elle n’est pas prête de se complaire avec un quelconque partenaire fut-il une puissance en quête de leadership régional au risque d’égratigner son indépendance et sa souveraineté. Au demeurant, le leadership auquel aspire Mohammed Ben Salmane est contesté par ses voisins les plus proches (Emirats arabes unis, Qatar). C’est ainsi que l’émir Mohamed Ben Zayed, en concurrence avec le prince Mohamed Ben Salmane, n’a pas participé au sommet et a délégué le prince Mansour Ben Zayed. Quant à l’émir du Qatar, il a décidé de son côté de quitter Djeddah avant la fin des travaux du sommet, ce qui n’a pas manqué d’être interprété comme un signe politique qui ne trompe pas. Tout en se tenant loin des querelles de leadership régional, l’Algérie continuera de militer en faveur du renforcement de l’action arabe commune en vue de relever les défis sécuritaires et économiques communs et ce, au moyen notamment de l’amélioration du fonctionnement de la Ligue arabe et de l’implication de la société civile arabe.

Mohamed Merabet