Libérez l’espace politique et médiatique !
26.09.2024. Plusieurs évènements récents indiquent malheureusement que le pouvoir algérien continue de museler les libertés démocratiques élémentaires pourtant reconnues par la Constitution sous des prétextes variés mais qui ne convainquent personne.
Par Mustapha Senhadji
Le ministère de la Communication a annoncé, dans un communiqué daté du 19 septembre la suspension de l’impression du quotidien « Djazair El Ghad » pour avoir publié un article contenant « des informations trompeuses, non documentées et contraires aux dispositions régissant le travail journalistique ». La suspension du journal a été suivie d’une action judiciaire qui pourrait se solder pr l’interdiction pure et simple de l’organe de presse et des poursuites pénales à l’encontre de son directeur de publication. Le journal en question est coupable d’avoir relayé une information faisant état d’une tentative d’attentat contre le président de la république.
Suite à une plainte déposée par l’entreprise publique « Madar » concernant le contenu médiatique publié par le journal électronique « Dzair Tube », le 12 septembre 2024, le ministère de la Communication a convoqué, dimanche 22 septembre 2024, le directeur de publication, M. Maamar Gani, en lui rappelant l’obligation de respecter les dispositions de loi organique relative à l’information.
Lors de sa rencontre avec les organisations syndicales et les associations nationales du secteur de la communication, le ministre de la Communication, Mohamed Laagab a exhorté les partenaires professionnels à « élever le niveau du travail journalistique en améliorant la qualité et en diversifiant les contenus journalistiques, en respectant la déontologie de la profession et en se conformant à la loi organique sur l’information », exprimant, à cet égard, « ses regrets quant aux récents dérapages de certains médias dans leur traitement de certains sujets sans la vérification des faits et au mépris des principes déontologiques les plus élémentaires ».
Récemment, on apprend que l’ancien diplomate et ancien ministre de la communication, Abdelaziz Rahabi, a été convoqué par les services de sécurité à la suite de la publication d’un post qui met en cause le verrouillage politique en vigueur au lendemain de l’annonce des résultats de l’élection présidentielle. Le service de sécurité lui aurait signifié une interdiction de sortie du territoire national à son encontre et lui aurait saisi son passeport. M.Rahabi n’est ni le premier ni le dernier citoyen à voir ainsi ses droits fondamentaux bafoués par des services de sécurité qui agissent comme s’ils étaient au-dessus des lois.
Ces éléments ne sont malheureusement pas des faits isolés. Ils s’inscrivent dans le cadre d’une campagne liberticide visant à museler l’espace médiatique dans le pays qui a commencé lors du premier mandat du président Tebboune mais qui continue visiblement. Le verrouillage médiatique s’accompagne d’une mise au pas des partis politiques qui ne se hasardent à aucune activité publique sans l’autorisation préalable de l’Administration et des services de sécurité.
Le verrouillage de l’espace politique et médiatique national ne constitue pas seulement une violation des droits fondamentaux des citoyens qui sont pourtant reconnus et défendus par la Constitution et les lois de la république. Il constitue également un facteur d’appauvrissement de la vie politique nationale qui a conduit à une grave dépolitisation de la jeunesse algérienne. Cette dernière est devenue, dans ces conditions, une cible facile pour les campagnes de désinformation visant la déstabilisation des institutions de l’Etat algérien.
En pointant du doigt ces graves dérives, nous ne sommes pas en train de réclamer une ouverture anarchique qui finirait par porter atteinte à la stabilité des institutions et à la paix civile en Algérie. L’Etat algérien a suffisamment de lois à sa disposition pour se défendre et défendre la société algérienne contre toutes les tentatives subversives d’où qu’elles viennent. Il n’a pas besoin pour ce faire des pratiques répressives attentatoires aux libertés des citoyens et qui sont au demeurant illégales.
Nous en appelons au président de la république, en tant que premier magistrat du pays, afin de mettre fin à ces pratiques pour permettre enfin aux partis politiques et aux médias d’assumer leurs missions respectives dans le respect de la loi mais sans intervention injustifiée des services de sécurité. Ces derniers devraient se concentrer sur leur mission légale qui consiste à défendre la sécurité intérieure et extérieure de l’Etat ainsi que la sécurité des personnes et des biens dans un pays libre dont les citoyens aspirent tout simplement à jouir des libertés fondamentales que leur garantit la Constitution.