Comment le pouvoir va réagir à l’électrochoc de l’abstention massive au référendum ?
» A quelque chose, malheur est bon » dit le dicton. Le taux d’abstention enregistré lors du référendum sur le projet de révision constitutionnelle va-t-il constituer l’électrochoc souhaité afin de pousser le pouvoir à prendre les mesures qui s’imposent avant que la situation ne devienne incontrôlable ? Même si rien n’a filtré de la réunion convoquée par le haut commandement de l’armée quelques heures après l’annonce des résultats du référendum, il est fort probable qu’il ait été question des mesures à envisager pour assurer la stabilité et la bonne marche des institutions de l’Etat dans les conditions difficiles que traverse l’Algérie.
En plus de la crise pétrolière, de la crise sanitaire et des menaces que fait peser sur la sécurité du pays l’évolution de la situation géopolitique régionale, l’Algérie doit gérer les conséquences politiques de l’absence du président de la république, transféré d’urgence dans un hôpital allemand depuis plusieurs jours. En l’absence d’une communication officielle fiable, la maladie du président est malheureusement l’objet d’une campagne de rumeurs malveillantes qui vise à déstabiliser l’Etat algérien. Garant de la sécurité nationale, l’ANP et les divers corps de sécurité doivent dans pareilles circonstances prendre toutes les mesures qui s’imposent pour permettre aux différents services publics de continuer à fonctionner normalement et répondre aux besoins de la population.
Le taux d’abstention enregistré lors du référendum du 1er novembre a dévoilé au grand jour une grave démobilisation populaire. Les conditions sanitaires particulières y ont été pour quelque chose mais elles ne peuvent pas tout justifier. Il y a un véritable fossé entre l’Etat et la population qu’il convient de prendre au sérieux et auquel il faut s’atteler à trouver des solutions à la hauteur du problème. En Kabylie, le fossé semble être plus important même si les motivations ne sont pas nécessairement les mêmes que dans les autres régions du pays. Malgré les difficultés de la tâche et les effets d’une crise multiple, les observateurs estiment que l’Algérie a les ressources pour sortir indemne de la phase difficile qu’elle traverse. Jusqu’ici, l’Etat algérien a pu compter sur la solidité de ses institutions administratives et sécuritaires pour faire face à toutes les tentatives de déstabilisation et sur le patriotisme de la majorité des Algériens. Cependant, les observateurs considèrent que le pouvoir ne pourra pas compter indéfiniment sur ces deux facteurs tant ils risquent de s’éroder avec le temps. Seul un changement radical des méthodes de gouvernance et une sortie graduelle du système administratif hérité de la colonisation permettront de réconcilier l’Etat algérien avec la population.
Mustapha Senhadji