El Guerguerat : Une nouvelle escalade qui risque de mettre en cause le cessez-le-feu

Ce que nous redoutions depuis plusieurs jours est en train de se passer au Sahara occidental. L’escalade politico-militaire du Maroc a atteint un point dangereux qui risque de mettre le feu aux poudres dans une région qui souffre déjà d’autres conflits que la communauté internationale n’arrive toujours pas à résoudre. Les forces armées marocaines ont mené ce vendredi une action militaire dans la région d’El Guerguerat, au sud ouest du Sahara Occidental, où des Sahraouis civils manifestaient pacifiquement depuis le 21 octobre, a indiqué l’Ambassadeur de la République arabe sahraoui démocratique en Algérie, M. Abdelkader Taleb Omar, dans une déclaration à la Chaine de télévision algérienne A3. L’agence sahraouie SPS a rapporté de son côté, que les forces marocaines ont ouvert trois brèches dans la région d’El Guerguerat, où ils ont mené l’agression contre les civils sahraouis.

Depuis plus de trois semaines, des Sahraouis civils (hommes et femmes) représentant notamment des associations de jeunesse, des femmes, des travailleurs, d’organisations de défense des droits de l’homme et plusieurs ONG opérant dans le domaine socioculturel, observent des sit-in à différents endroits le long du mur de sable érigé par l’occupant marocain. Ils manifestent pour exiger notamment la fermeture définitive de la brèche illégale d’El-Guerguerat dans l’extrême sud-ouest du Sahara occidental. Les manifestations, se veulent, selon les organisateurs, un moyen de faire face aux manœuvres et provocations marocaines et réclamer l’organisation du référendum d’autodétermination, l’objectif pour lequel a été créée la Mission des Nations unies au Sahara occidental (Minurso). Aussi, les manifestants appellent à mettre un terme à la souffrance inacceptable du peuple sahraoui face au silence de l’ONU notamment dans les territoires occupés. Ils exigent également le retrait immédiat des troupes marocaines des territoires sahraouis occupés et la vérité sur le sort des disparus ainsi que la libération de tous les prisonniers civils sahraouis détenus dans les geôles marocaines.

Comme d’habitude, les médias marocains se sont déchaînés contre ce qu’ils appellent les « séparatistes » et les « mercenaires » du Front Polisario et leur allié, l’Algérie. Pourtant les provocations marocaines dans la zone d’El Guerguerat sont telles que même le président de la commission de défense du sénat américain, le sénateur républicain, James Inhofe, a dénoncé il y a quelques jours le comportement des autorités marocaines qu’il a qualifié de violation de l’Accord de cessez-le-feu signé en 1991 sous l’auspice des Nations Unies. Selon les observateurs, il n’est pas exclu que le Maroc cherche à profiter de la conjoncture internationale et régionale (transition aux Etats-Unis, tensions géopolitiques en Méditerranée orientale, instabilité engendrée par la maladie du président algérien) pour mettre la communauté internationale devant le fait accompli. Il n’est pas non plus exclu que le régime marocain cherche à détourner l’attention de la population marocaine des graves conséquences de sa gestion de la crise sanitaire engendrée par la pandémie de la Covid-19 vers ce qui se passe au Sahara occidental dans l’espoir de créer une nouvelle « union sacrée » autour du régime. Il reste à espérer que l’ensemble des protagonistes de cette crise retrouvent la raison et fassent preuve de la retenue nécessaire pour éviter aux peuples de la région de nouvelles souffrances inutiles.

Mohamed Merabet