La classe politique réagit à la déclaration du général Toufik
La déclaration du général Toufik dans laquelle il a exprimé sa réprobation de la condamnation de son ancien adjoint, le général Hassan n’a pas laissé indifférents les responsables des partis politiques. La réaction de soutien de soutien ouvert est venue de la part de Louisa Hanoune qui n’a cessé ces derniers temps de dénoncer les changements opérés au sein de l’institution sécuritaire et la mise à la retraite de plusieurs généraux : « La lettre du général Toufik m’a rappelé le témoignage du président de la République sur le général Hassan, en janvier 2014 lorsque je l’ai rencontré. Il m’a dit que c’est un patriote jusqu’à l’os, qu’il est d’un souverainisme même agaçant, il est la probité même et concernant sa compétence il m’a même souligné la finesse de son analyse et sa vision prospective », a-t-elle déclaré lors d’un point de presse. « Celui qui a fait la lettre (le général Toufik), n’est pas un opposant, il n’est pas signataire de la lettre des 19 et il ne conteste pas le système de gouvernance. Il s’agit de l’ex-premier responsable des services secrets algériens. Il dit dans sa lettre qu’il a épuisé toutes les voies réglementaires. C’est la preuve que les canaux vers le président de la République sont fermés. », a-t-elle déclaré. « Je salue la sortie médiatique du général Toufik parce qu’il n’a pas d’autres choix. Il a défendu l’honneur d’un haut gradé de l’armée et des autres officiers supérieurs », a-t-elle conclu.
Ce n’est pas tout à fait l’avis des dirigeants du RCD et du FFS. Le secrétaire national du FFS, Mohamed Nebbou a voulu se montrer au-dessus de la mêlée en mettant l’accent sur la nécessité de préserver l’Etat : « En tant que parti, nous avons toujours assumé nos responsabilités et nous n’allons pas polémiquer autour des personnes ni autour des déclarations de personnes. Chacun doit assumer ses responsabilités devant l’histoire. L’objectif du FFS est de sauver l’État algérien et non pas le pouvoir. Nous avons besoin d’institutions fortes et nous travaillons pour la continuité de l’État, ce que nous recherchons c’est d’instaurer un État démocratique et de droit » Cela n’a pas empêché le dirigeant du FFS de prendre ses distances à l’égard de l’ancien patron du DRS en affirmant qu’il aurait souhaité qu’il dénonce non seulement l’injustice faite à un général mais aussi aux 200 000 victimes de la tragédie nationale et aux 10 000 disparus de la décennie noire.
Par la bouche de son chargé de communication, Athmane Mazouz, le RCD n’a pas hésité pour sa part à se montrer dur dans son jugement des anciennes pratiques de ce qu’il appelle la « police politique » : « L’intrusion médiatique de Toufik ne fait plus mystère sur la guerre des clans qu’on se livre au sommet de l’État et le choix du moment de sa sortie est plus important à décrypter que le contenu de sa déclaration. On ne découvre pas l’injustice après avoir longtemps laissé faire. La missive obligée du général Toufik met à nu tout un système qu’il a longtemps incarné. S’il découvre enfin qu’une injustice est commise alors que l’arbitraire a prospéré sous son règne, sous ses ordres, ses protégés et ses présidents désignés, on ne peut que considérer qu’enfin la vérité finit toujours par triompher. Je ne peux juger de la culpabilité ou du jugement rendu dans l’affaire du personnage qu’il défend, mais sa déclaration a le mérite d’éclairer un peu plus sur le drame algérien et les responsables de la faillite de tout un pays. Dans sa déclaration, Toufik, dépouillé de son pouvoir, a dû mesurer toute l’étendue de la tyrannie abusive et arbitraire de sa police politique et de ses décisions complices qui ont ruiné le destin de toute une Nation »
Les observateurs interrogés estiment que ces réactions ne sont pas étonnantes. Louisa Hanoune n’a pas d’autre choix que de soutenir ses anciens sponsors politiques au sein du DRS dont la mise à l’écart risque tout simplement de lui coûter sa carrière politique. En ce qui concerne le RCD et le FFS, les observateurs sont divisés. Pour les uns, ces deux partis qui ont profité des quotas du pouvoir et de sa police politique tant décriés, sont obligés de se positionner ainsi aujourd‘hui dans la mesure où étant toujours en contact avec des sponsors au sein du régime qu’ils critiquent par ailleurs, ils pensent que le général Toufik et ses partisans sont politiquement finis et qu’il est temps d’investir dans d’autres « cousins » pour garder un pied dans les institutions. Pour d’autres observateurs, si la position apparemment radicale du RCD ne doit pas tromper dans la mesure où ce parti cherche seulement à faire monter les enchères pour sa réadmission dans les cercles du pouvoir, la position modérée du FFS dénote une certaine maturation politique en rapport avec une prise de conscience des enjeux de la conjoncture internationale et régionale difficile par laquelle passe le pays. Pour ces observateurs, la volonté du FFS de rechercher l’entente nationale et le consensus devrait lui permettre de se retrouver avec d’autres forces nationales en vue de construire une alternative politique capable d’aider le pays à surmonter les difficultés présentes.