La France cherche à écarter l’ANP du processus de transition
La décision du clan Bouteflika de reporter l’élection présidentielle malgré les réserves du chef d’état-major de l’ANP ne pouvait pas être prise sans l’aval des grandes puissances et surtout de la France qui continue d’avoir une influence majeure en Algérie. En effet, selon nos sources, l’alliance entre les frères Bouteflika et le coordinateur des services de sécurité, Bachir Tartag, ne suffit pas à expliquer la facilité avec laquelle le clan présidentiel a effectué ce qu’on pourrait appeler un véritable « coup d’Etat » puisque la Constitution algérienne ne prévoit la possibilité d’un report de l’élection présidentielle qu’en cas de guerre ou de « danger imminent » menaçant la nation. La décision du président Bouteflika de faire superviser la période de transition d’un an par une Conférence nationale dont les membres seront filtrés par un gouvernement à la solde du clan présidentiel, de ses amis oligarques et de la France est une manoeuvre visant à contourner le mouvement populaire et son aspiration à un véritable changement de système. Les observateurs estiment que le clan présidentiel et la mafia politico-financière qui gravite autour de lui, ne peuvent garder le contrôle sur la période de transition que s’ils neutralisent l’armée algérienne.
C’est ce qui explique que ces dernières semaines, les services français n’ont pas cessé leurs campagnes de désinformation et de déstabilisation visant l’armée algérienne dont le chef d’état-major est accusé de vouloir prendre le pouvoir au moment où, au contraire, il doit faire face aux pressions de ceux qui, à l’intérieur comme à l’extérieur du système, lui demandaient d’appliquer l’article 102 de la Constitution en vue de destituer le président Bouteflika. A cet égard, le site Maghreb Intelligence, proche des services français et makhzéniens, vient de faire des révélations intéressantes. Après avoir prétendu que le général Gaïd Salah « veut se placer à tout prix comme le chef d’orchestre de la période de transition qui doit se mettre en place dés l’annonce de l’abandon du 5e mandat », le site français révèle que « L’homme fort de l’armée algérienne et son clan rencontrent un énorme obstacle : le refus des puissants étrangères de traiter avec eux ! En effet, nous avons appris de sources sûres que ni la France, ni encore moins l’Union Européenne, ni Washington n’ont accepté de voir en Gaïd Salah une alternative au 5e mandat d’Abdelaziz Bouteflika…La France ne cautionnera pas la prise de pouvoir par des généraux ».
En fait, il n’a jamais été question que l’armée algérienne prenne le pouvoir. Ce que le peuple et plusieurs formations politiques demandent c’est que l’armée supervise le processus de transition qui devrait rester entre les mains des acteurs algériens, y compris les représentants du mouvement populaire, dans le cadre d’une conférence nationale inclusive, convoquée par un gouvernement d’union nationale. Les pressions françaises qui sont actuellement exercées sur l’armée algérienne pour qu’elle ne se mêle pas du processus de transition n’ont, selon les observateurs, qu’un seul objectif : laisser la voie libre aux élites liées à l’oligarchie algérienne et inféodées à la France qui rêvent d’une « seconde république » taillée à la mesure de leurs appétits voraces. Reste l’inconnue essentielle : la jeunesse algérienne. Se laissera-t-elle berner par les fausses promesse du clan Bouteflika ou continuera-t-elle sa mobilisation pacifique jusqu’au départ de ce clan et son remplacement par un gouvernement d’Union nationale formé de personnalités intègres et compétentes qui ne se sont jamais compromises avec le système ?
Mohamed Merabet