Les Algériens rejettent la feuille de route du pouvoir
Les Algériens sont descendus massivement dans la rue pour le quatrième vendredi consécutif. Le mouvement qui a démarré le vendredi 22 février par le rejet du cinquième mandat exige désormais la fin du système. Les millions d’Algériens qui ont marché ce vendredi à travers tout le pays ont montré leur détermination à continuer leur mobilisation citoyenne et pacifique jusqu’à la pleine réalisation de leurs revendications. Pour les observateurs, il s’agit là d’un véritable référendum contre la prolongation du quatrième mandat de Bouteflika, un référendum contre la « feuille de route » proposée par le pouvoir pour sortir de la crise.
A travers les slogans criés et les banderoles agitées par les manifestants, on comprend que les Algériens ne veulent pas donner une minute de plus au régime de Bouteflika dont le mandat constitutionnel s’achève dans quelques semaines. Mais les Algériens ne sont pas dupes. Ils savent que derrière le président Bouteflika, c’est tout un système corrompu qui se cache et qui cherche à se succéder à lui-même par des artifices. Les Algériens voient dans les promesses du pouvoir et notamment la « conférence nationale » promise, une manoeuvre du régime pour gagner du temps et ils ne se gênent pas pour le crier haut et fort. Mais ce qui frappe le plus l’attention des observateurs surtout dans les wilayas de l’intérieur du pays, aussi bien à l’est qu’à l’ouest et au sud, ce sont les orientations imprimées au mouvement par les militants de la jeune génération. Les dimensions nationale, démocratique et sociale, contenues dans la Déclaration du 1er novembre 1954, sont reprises par le mouvement populaire.
A l’exception de la Kabylie, les slogans et les pancartes sont en langue arabe. Dans la capitale, comme on peut le voir dans la vidéo ci-dessous, si on peut apercevoir parfois le drapeau berbériste, le drapeau national est fortement représenté aux côtés d’un autre drapeau cher dans le coeur des Algériens, le drapeau palestinien. En Oranie, de grands posters de l’Emir Abdelkader sont réapparus. A Tlemcen, les partisans de Bachir El Ibrahimi ont marché aux côtés des partisans de Messali Hadj. Les Algériens n’ont pas oublié les victimes de Nouvelle Zélande à la mémoire desquelles plusieurs banderoles ont été dédiées. L’ingérence étrangère est clairement dénoncée par les manifestants. Dans plusieurs wilayas, les manifestants ont tenu à remettre à sa place la France qui cherche à perpétuer coûte que coûte son hégémonie en Algérie en soutenant un régime à bout de souffle qui est en train d’être lâché y compris par les élites minoritaires qui ont longtemps profité de ses largesses. Une pancarte résume les sentiments d’un grand nombre d’Algériens : » Oh, France, laisse-nous tranquilles, nous sommes en train de nettoyer les déchets que tu as laissés« . Pour les observateurs, si elle ne changera pas d’avis le clan présidentiel et les affairistes qui gravitent autour de lui , la mobilisation massive de ce vendredi ne laissera pas indifférents les décideurs qui ont en charge la sécurité du pays.
Mohamed Merabet