Les aveux troublants du général Toufik devant les juges
Le procès de Said Bouteflika, des généraux Toufik et Tartag et de Louisa Hanoune devant le Tribunal militaire de Blida s’est poursuivi mardi pour la seconde journée consécutive par l’interrogatoire du général Toufik. Si la veille, le général Tartag a refusé de se présenter devant les juges et si Said Bouteflika a refusé de répondre aux questions des juges, pour sa part, le général Toufik a fait des déclarations qui sonnent comme un aveu même si ses avocats continuent de nier l’évidence. Accusé de « complot contre l’autorité de l’Etat », le général Toufik a reconnu qu’il avait participé à une réunion avec Said Bouteflika et Louisa Hanoune dans une résidence d’Etat et qu’il aurait proposé le nom de l’ancien président Liamine Zeroual pour diriger provisoirement le pays.
Pour les observateurs, il est difficile de faire de tels aveux et de nier en même temps l’accusation de « complot » qui lui est adressée par le procureur militaire. Comment peut-on qualifier juridiquement le fait de préparer un changement à la tête de l’Etat et de l’armée avec la complicité d’un homme -Said Bouteflika en l’occurrence- qui n’avait au moment des faits aucune autorité constitutionnelle puisqu’officiellement il n’était qu’un conseiller du président de la république ?
Mais au-delà de la qualification juridique des faits reprochés aux quatre accusés, les observateurs s’interrogent sur la nature du pouvoir et sur les réseaux sur lesquels s’appuyait le général Toufik pour envisager de destituer le chef de l’armée et de mettre à la tête de l’Etat Liamine Zeroual non sans avoir prévu pour lui-même le poste éminent de ministre conseiller de la défense et de la sécurité. En mettant à la tête de l’Etat un personnage respecté comme Liamine Zeroual mais sans véritable assise politique et donc sans réel pouvoir et en installant à la tête de l’armée un fidèle -le général major Said Bey-, le général Toufik s’apprêtait en fait à prendre le pouvoir. Difficile de penser qu’un tel scénario allait se réaliser sans l’aval de puissances étrangères.
Mohamed Merabet