Les nouvelles révélations de l’ancien ministre Belaïd Abdesslam

L’ancien ministre Belaïd Abbdesslam a apporté un témoignage intéressant sur la période durant laquelle il a eu à assurer des hautes responsabilités au sein du gouvernement.  Dans un entretien au quotidien Echorouk, il a expliqué son limogeage du gouvernement en 1993 par le HCE par des raisons à la fois politiques (l’hostilité des généraux issus de l’armée française à son égard) et économiques (l’hostilité des barons de l’import à l’égard de sa politique de restriction des importations dans le cadre de ce qu’il appelait l’« économie de guerre »). Les deux raisons sont d’ailleurs liées dans la mesure où certains des généraux qui ont effectué le coup d’Etat du 11 janvier 1992 étaient alliés à des milliardaires comme Rebrab qui allaient profiter de la décennie sanglante pour édifier de grandes fortunes. Dans son témoignage, Belaïd Abdesslam n’hésite pas à reprendre à son compte le récit selon lequel le général De Gaulle, qui ne croyait plus à la perspective de l’ « Algérie française », avait encouragé à partir de 1958 des officiers algériens de l’armée française à rallier l’ALN pour préparer le terrain à la mainmise néocoloniale de la France sur l’Algérie le moment venu. Dans un précédent ouvrage consacré à cette période, Belaïd Abdesslam avait accusé le général Mohamed Touati (conseiller politique du général Khaled Nezzar et un des architectes du coup d’Etat du 11 janvier 1992) d’être à l’origine de son limogeage. Le général Touati était, selon Belaïd Abdesslam, le principal protecteur de deux barons de l’import que sa politique économique restricitve dérangeait.

Dans ce témoignage, Belaïd Abdesslam est revenu également sur la période du président Houari Boumediene. Il révèle notamment que c’est lui qui a informé le président Houari Boumediene du fait que Messaoud Zeggar avait empoché en Suisse des pots-de-vin sur des contrats d’équipement signés avec des sociétés américaines. Le président Boumediene aurait été choqué par cette information et serait entré en crise avec son ancien compagnon et ami. Ce que Belaïd Abdesslam ne dit pas dans son témoignage c’est que l’affaire Zeggar avait fait le jeu des clans liés aux intérêts français qui avaient intérêt à neutraliser Zeggar et à éloigner les Américains de l’Algérie afin de laisser place nette aux Français. En effet, Belaïd Abdesslam avait dans son cabinet des conseillers d’origine française très influents, ce qui explique, selon certains observateurs, l’opposition de son ministère à la politique d’arabisation à l’époque.

Belaïd Abdesslam revient enfin sur l’épisode qui a vu le président Boumediene se débarrasser de deux membres influents du Conseil de la Révolution : le colonel Ahmed Bencherif et le colonel Ahmed Draïa qui dirigeaient respectivement la Gendarmerie nationale et la Sûreté nationale. La nomination du premier à la tête du ministère de l’hydraulique et du second à la tête du ministère des transports était, selon Belaïd Abdesslam, une manoeuvre du président Boumediene pour enlever à ces responsables le pouvoir qu’ils avaient acquis en dirigeant deux instituions sécuritaires stratégiques. Quant à la décision prise en 1977 par le président Houari Boumediene de restructurer le ministère de l’énergie et de le scinder en trois ministères (Energie, Industrie lourde, Industries légères), Belaïd Abdesslam l’explique par les manœuvres que ses détracteurs ne cessaient d’effectuer auprès du président Boumediene dans le but d’envenimer les relations entre les deux hommes.