Quand le « patriote » Khaled Nezzar plaidait pour le plan d’autonomie marocain au Sahara occidental

30.12.2023. Les funérailles « présidentielles » organisées par le pouvoir algérien au défunt Khaled Nezzar ont suscité une grande polémique parmi les Algériens sur les réseaux sociaux. En cause le parcours controversé de l’ancien ministre de la défense nationale qui passe pour être un « sauveur de la république » aux yeux de quelques partis « démocratiques » ultra-minoritaires et un « criminel de guerre » aux yeux des islamistes et d’une grande partie de l’opinion publique algérienne.

En organisant des funérailles officielles à l’ancien ministre de la défense nationale, le pouvoir algérien peut se targuer d’avoir obéi à la » raison d’Etat ». C’est aussi au nom de cette « raison d’Etat » que le pouvoir algérien a réagi avec virulence à l’annonce par la Justice suisse du renvoi de Khaled Nezzar devant le Tribunal pénal fédéral suisse en Juin prochain pour des « crimes de guerre » et « crimes contre l’humanité« .

Mais la « raison d’Etat » derrière laquelle se cache le pouvoir algérien risque de s’effriter si on considère les turpitudes de Khaled Nezzar durant les années où il était officiellement hors service. Durant les années Bouteflika, Nezzar a continué à influencer le jeu politique derrière le rideau grâce notamment à son alliance avec l’ancien patron de l’ex-DRS, le général Toufik. Pire, dans les années qui ont suivi la chute de son ami Toufik en 2015, Nezzar n’a pas hésité à prendre la tête de la fronde contre l’ancien chef d’état-major de l’ANP, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd-Salah, allant jusqu’à appeler à la sédition contre lui, ce qui équivaut à une grave atteinte à la cohésion de l’armée. Durant le Hirak de 2019, Nezzar s’est allié à Saïd Bouteflika et à Toufik pour tenter de reprendre le pouvoir via l’instauration d’un « Comité national de transition ».

Mais là où le pouvoir algérien montre qu’il a une curieuse conception de la « raison d’Etat » c’est lorsqu’il oublie si facilement les fois où le « grand patriote » Nezzar n’a pas hésité à prendre publiquement des positions contraires à celles de l’Etat algérien sur des questions sensibles comme par exemple la question du Sahara occidental. Le 12 mars 2003, le quotidien marocain, Al Bayane, s’est fait un plaisir de répercuter sa déclaration fracassante en faveur d’une « autonomie plus ou moins large du Sahara occidental » dans le cadre de la souveraineté marocaine en prétextant que « l’Algérie n’avait pas besoin d’avoir un Etat supplémentaire à ses frontières« . Le 30 septembre 2004, le journal électronique paraissant à Londres, Elaf, avait rapporté une déclaration de Khaled Nezzar dans laquelle il se démarquait de la position de l’envoyé spécial des Nations Unies,James Baker, qui était en faveur d’un référendum d’autodétermination au Sahara occidental. Une fois de plus, Nezzar avait exprimé sa préférence pour le plan d’autonomie marocain au Sahara occidental.

Mustapha Senhadji