Que signifie le 8 mars pour les femmes de Gaza qui tentent de survivre à l’horreur de la guerre ?
08.03.2024. Ce 08 mars, on célébrait dans le monde entier la Journée internationale des femmes. C’est l’occasion pour les femmes de faire le bilan des réalisations accomplies en matière de développement social et d’égalité des droits dans leurs sociétés respectives. Dans la plupart des pays du sud, les femmes ont encore un long chemin à parcourir pour arriver à jouir pleinement de leurs droits humains fondamentaux. Mais dans la bande de Gaza livrée à l’horreur d’une guerre dévastatrice, ce 8 mars n’a aucune résonance pour les femmes palestiniennes qui ont pu échapper à la mort mais continuent de végéter dans des conditions inhumaines.
Abir Abu Abadi, 34 ans, qui vit dans un campement de fortune à Rafah, dit « ne rien avoir à célébrer » le 8 mars alors que les Gazaouies – dont au moins 9.000 auraient été tuées depuis le 7 octobre selon l’ONU Femmes – vivent dans « l’horreur des bombardements ». Le quotidien des femmes de l’enclave palestinienne s’apparente à un avant-goût de l’enfer… sur terre, avec le lot de drames, d’humiliation, de misère, de violence et de vulnérabilité. Samah al-Helou, 21 ans, avait besoin d’une « intervention chirurgicale » lors de son accouchement, mais a dû attendre « deux semaines », car « il n’y avait pas de médecins, pas de lits et pas de bloc opératoire ». Une expérience traumatisante qui lui fait dire que la vie à Gaza pour une femme enceinte est « pire qu’en enfer ». Faute d’électricité ou de carburant pour faire fonctionner les générateurs, les femmes accouchent à la lueur des téléphones portables et s’abritent aussitôt sous des tentes, à la merci du froid et autres intempéries. « J’avais très, très peur de perdre le bébé », confie Samah al-Helou, car « ma grossesse était risquée dès le début » et « la situation s’est aggravée » lorsque la famille a dû quitter son domicile en raison des combats.
Les statistiques de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), nous renseignent que la bande de Gaza compte 52 000 femmes enceintes. Un véritable défi, eu égard à l’insuffisance des structures médicales, des consommables et des médicaments. Le système de santé s’est effondré dans la bande de Gaza où seuls 12 des 36 hôpitaux fonctionnent partiellement. Dans le sud, où vivent plus d’1,5 million de personnes dont une immense majorité a été déplacée par la guerre, il ne reste plus que cinq salles pour les accouchements à l’hôpital Emirati de Rafah. Selon des témoignages recueillis par l’AFP, des femmes ont dû accoucher dans la rue ou à même le sol à l’hôpital. D’autres disent qu’on leur a demandé d’apporter un matelas et des draps pour pouvoir rester à l’hôpital après la naissance. Pour pallier ces conditions d’hygiène déplorables, l’ONU a distribué des milliers de kits pour des accouchements autonomes, contenant des draps jetables ou du matériel stérile pour couper le cordon ombilical. Selon un rapport de l’UNFPA publié en février, les femmes enceintes arrivent en outre souvent à terme avec des infections génito-urinaires compromettant la bonne santé des nouveaux nés.
Si accoucher actuellement à Gaza constitue un défi pour les femmes, l’hygiène corporelle est une réelle préoccupation. La pénurie d’eau potable à Gaza impacte le confort des femmes. Une employée de l’ONG britannique ActionAid a confié à TRT français sous couvert d’anonymat avoir souffert pendant ses menstruations à cause du manque d’hygiène dans l’enclave assiégée de Gaza. « Il n’y a pas d’eau, j’ai souffert pendant mes règles. Il n’y avait pas d’eau disponible pour que je puisse me laver pendant mes menstrues. Je n’avais pas de serviettes hygiéniques pour mes propres besoins pendant mes règles », a-t-elle raconté. La pénurie de serviettes hygiéniques oblige les femmes et filles de Gaza à mettre en danger leur santé en ayant recours à des méthodes inappropriées pour contenir les menstrues, déplore ActionAid. “Elles découpent de petites pièces de tentes dont elles se servent pour se protéger du froid et de la pluie, pour les substituer aux serviettes hygiéniques, ce qui les expose au risque d’infection”. Les plus téméraires et résilientes, explique Riham Jafari, coordinatrice du plaidoyer et de la communication à ActionAid Palestine “(…) se rendent dans les centres de santé pour demander des pilules contraceptives afin de bloquer leurs règles en raison du manque de serviettes hygiéniques et d’eau”. C’est dire à quel point la destruction du système sanitaire de Gaza présente un risque réel pour la gent féminine de Gaza.
Source : TRT