Amnesty International épingle l’Algérie
Dans son dernier rapport, l’organisation de de défense des droits de l’Homme, Amnesty International épingle l’Algérie. Même si elle reconnaît des progrès comme notamment le fait que « les parlementaires ont adopté une loi modifiant le Code pénal en vue de mieux protéger les femmes contre la violence » et le fait qu’aucune exécution n’a eu lieu en Algérie depuis plus d’une vingtaine d’années, l’organisation dénonce plusieurs atteintes aux libertés publiques et aux droits humains et le fait que les autorités ont persisté dans leur refus d’autoriser l’accès au pays à des organes et experts des Nations unies dans le domaine des droits humains, notamment ceux chargés de la torture, de la lutte contre le terrorisme, des disparitions forcées et de la liberté et d’association.
L’organisation revient notamment sur les évènements qui ont endeuillé le Mzab. Elle rapporte qu’au moins 25 personnes ont été tuées et d’autres blessées en juillet lors de violences intercommunautaires dans la vallée du Mzab. Elle rappelle également qu’en janvier, les autorités ont réagi à des manifestations contre le chômage dans la ville de Laghouat, dans le sud du pays, en interpellant des militants et des manifestants pacifiques, dont ceux qui protestaient pour manifester leur solidarité avec des militants emprisonnés. Certaines des personnes arrêtées ont fait l’objet de poursuites pénales pour, entre autres, participation à des « attroupements non armés ». Cela a notamment été le cas de Mohamed Rag, de Belkacem Khencha et d’autres membres du Comité national pour la défense des droits des chômeurs (CNDDC), qui ont été condamnés à des peines d’un à deux ans de prison, dont certaines ont été réduites en appel. En mars, un tribunal de la ville d’El Oued, dans le sud du pays, a condamné cinq manifestants pacifiques à des peines allant jusqu’à quatre mois d’emprisonnement. Les intéressés ont été laissés en liberté provisoire en attendant qu’il soit statué sur leur recours. En octobre, un tribunal de Tamanrasset a condamné sept manifestants à une peine d’un an de prison ; six d’entre eux se sont vu accorder le sursis en appel.
Hassan Bouras, responsable régional de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH), a été arrêté par les forces de sécurité en octobre dans la ville d’El Bayadh. Sous le coup d’une information judiciaire pour « outrage envers un corps constitué » et pour avoir « incité des citoyens ou habitants à s’armer contre l’autorité de l’État ou à s’armer les uns contre les autres » (des chefs passibles de la peine de mort), il était toujours en détention à la fin de l’année. En novembre, un tribunal d’El Oued a condamné le caricaturiste Tahar Djehiche à six mois d’emprisonnement et une amende de 500 000 dinars algériens (environ 4 600 dollars des États-Unis) pour « atteinte » au président Abdelaziz Bouteflika et « provocation » à une action de protestation contre le gaz de schiste pour un commentaire qu’il avait laissé sur sa page Facebook. Il avait été acquitté en première instance. Il a été laissé en liberté provisoire dans l’attente de l’examen de son recours devant la Cour suprême. Celle-ci ne s’était pas prononcée à la fin de l’année. En mars, un tribunal d’El Oued a condamné Rachid Aouine, militant contre la corruption et membre du CNDDC, à une amende de 20 000 dinars algériens et à six mois d’emprisonnement – peine ramenée à quatre mois en appel –, après l’avoir déclaré coupable d’« incitation à un attroupement non armé ». Les poursuites engagées contre cet homme étaient liées à un commentaire sarcastique qu’il avait publié sur Facebook
Sur le plan des atteintes à la liberté d’expression, l’organisation cite plusieurs cas. Des journalistes, des caricaturistes et des militants, entre autres, ont fait l’objet de poursuites pénales pour injure, diffamation et autres chefs d’inculpation similaires. En février, un tribunal d’Oran a déclaré Mohamed Chergui coupable d’atteinte au prophète Mahomet à la suite d’une plainte de la direction du journal pour lequel il travaillait, El Djoumhouria, à propos d’un article qu’il avait rédigé en se fondant sur des recherches universitaires sur l’islam conduites à l’étranger. Cet homme a été condamné par défaut à trois ans d’emprisonnement et à une amende de 200 000 dinars algériens. Sa peine d’emprisonnement a été ramenée ultérieurement à un an avec sursis. Il s’est pourvu en appel. Le journaliste Abdelhai Abdessamie a été remis en liberté sous caution en septembre après avoir passé plus de deux ans en détention provisoire. Il travaillait pour les journaux Djaridati et Mon Journal, fermés par les autorités en 2013 pour avoir évoqué la santé du président Bouteflika. Les autorités l’ont accusé d’avoir aidé le directeur de la rédaction des journaux à quitter clandestinement l’Algérie pour la Tunisie. Après son arrestation en 2013, Abdelhai Abdessamiae été arbitrairement maintenu en détention par la police judiciaire pendant six jours, en violation de la législation algérienne, avant d’être remis à la gendarmerie nationale et à la sécurité militaire pour interrogatoire.