Le FLN et le RND désapprouvent Benghebrit
La mobilisation des syndicats, des associations des parents d’élèves et des jeunes sur les réseaux sociaux contre le projet d’enseignement de l’arabe dialectal dans le premier cycle primaire commence à donner ses fruits. En effet, les principaux partis au pouvoir, le FLN et le RND viennent de réagir publiquement en désapprouvant la ministre de l’éducation nationale, Nouria Benghebrit. Le président du groupe du FLN à l’APN, Mohamed Djemai a déclaré à propos de la conférence d’évaluation de la réforme du système éducatif que «Cette conférence a créé une tempête médiatique, sociale et politique. Notre pays n’a pas besoin d’une telle turbulence en ce moment précis» avant d’ajouter : «Nous pensons tant au sein du parti que dans le groupe parlementaire du FLN que cette conférence n’a rien apporté de nouveau pour une raison simple : les enseignants algériens avec leur ingéniosité ont l’habitude d’utiliser les langues populaires d’eux-mêmes pour transmettre au mieux le message aux élèves. Ce n’est donc pas une nouveauté ».
M. Djeami, un proche de Amar Saadani, s’est gardé de dénoncer clairement et franchement la ministre de l’éducation et ses collaborateurs qui, en faisant semblant d’introduire les « langues maternelles », cherchent en fait à saper le statut de la langue arabe en tant que première langue en Algérie. Le responsable du FLN se contente de dénoncer les conséquences déstabilisatrices de la proposition de la ministre de l’éducation et de renvoyer dos à dos ceux qui défendent un projet antinational et anticonstitutionnel et ceux qui défendent la langue nationale et officielle. « À nos yeux, la ministre n’a fait que donner l’occasion aux ennemis de la langue arabe pour l’attaquer ainsi qu’à ceux qui se considèrent comme étant les dépositaires de la langue arabe de s’exprimer et de se mettre sous le feu des projecteurs ».
De son côté, le porte-parole du second parti au pouvoir, le RND, Seddik Chiheb, a également exprimé publiquement son désaccord avec la dé »marche de la ministre de l’éducation nationale et a appelé à mettre l’école à l’abri des « tentatives de politisation. » Dans une déclaration au quotidien El Khabar, M. Chiheb a soutenu que la décision d’introduire la darja (l’arabe dialectal) en préscolaire et durant les deux premières années primaire est « une opération marquée par la précipitation, l’ambiguïté et l’improvisation » aussi bien dans la manière de poser la question que de la traiter.
Si la position exprimée par les responsables du FLN et du RND reste assez modérée en comparaison avec les enjeux de la polémique, il n’en reste pas moins qu’elle dénote le fait que le pouvoir est en train de prendre ses distances avec la ministre de l’éducation ne serait-ce que parce qu’il craint les retombées déstabilisatrices d’une confrontation sociale à ce sujet à la rentrée scolaire. Le caractère modéré de la réaction de ces deux responsables du FLN et du RND montre s’explique sans doute par le souci de la solidarité gouvernementale. Mais il peut également nous renseigner sur l’influence que continuent à avoir les partisans du lobby francophile et anti-arabe au sein des appareils de l’Etat. La mobilisation sociale déclenchée par le projet néocolonial de Benghebrit et Benramdane ne doit pas faiblir jusqu’au retrait pur et simple de la proposition en question et la révocation de ces deux symboles de l’école néocoloniale en Algérie qui cherchent à noyer leur complexe à l’égard de la langue arabe dans une rhétorique aux accents faussement pédagogiques.