La LADDH appelle à reconnaître les « spécificités » de Ghardaïa
Dans un communiqué rendu public suite à la dernière réunion de son bureau exécutif à Alger, la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH) est revenue sur la situation qui prévaut dans la wilaya de Ghardaïa. A cette occasion, la LADDH a invité les autorités à penser à des solutions plus appropriées en cessant de miser exclusivement sur les solutions sécuritaires qui, selon elle, ne parviendront jamais à elles seules à résoudre les problèmes dont souffre la région. Dans un autre registre, la LADDH a recommandé aux militants des droits de l’homme ainsi qu’aux professionnels de la presse d’éviter de qualifier les évènements de Ghardaïa de conflits intercommunautaires. « 0n ne peut bâtir un Etat moderne quand des militants des droits de l’homme mènent une propagande contre cette ville, en répandant de fausses informations d’après lesquelles le conflit qui ébranle Ghardaïa est d’origine ethnique ou doctrinal », prévient la LADDH dans un communiqué de presse publié hier après la réunion du bureau exécutif de la Ligue qui a eu lieu dimanche à Alger. La Ligue considère qu’il s’agit d’une qualification à dessein pour frapper l’unité nationale et répandre la fitna au sein du peuple. La LADDH recommande aussi aux journalistes de ne pas reprendre les informations émanant de certaines organisations des droits de l’homme qui prétendent que les crimes commis sont d’ordre ethnique ou doctrinal. Cependant, la LADDH est restée évasive quant aux propositions concrètes en vue de trouver des « solutions appropriées » à la crise. Pire, en appelant l’Etat à reconnaître les « spécificités » de la wilaya de Ghardaïa sans préciser ce que cela voudrait dire, la LADDH risque d’être entraînée sur un terrain politique qui n’est pas le sien et d’alimenter involontairement le discours ethniciste qu’elle feint par ailleurs de condamner. « L’Etat doit reconnaître les spécificités de cette ville, la particularité de sa société et de sa civilisation et en tenir compte dans ses plans et ses politiques de développement », a recommandé la Ligue. En effet, la LADDH n’est pas un parti politique pour se permettre de proposer à l’Etat une formule politico-constitutionnelle quelconque. Ensuite, il n’est un secret pour personne que certaines parties entretiennent le chauvinisme et la xénophobie dans la région au nom de la préservation des « spécificités » et de l’ « équilibre démographique » des principales villes du Mzab. La LADDH invite à juste titre la société civile à répandre la politique de la tolérance et les principes de la citoyenneté mais omet de dire que la culture de la tolérance et de la diversité exige précisément de dépasser une certaine conception étroite de la défense des « spécificités ». En tenant un discours politique aussi vague qui pourrait être mal interprété, la LADDH prend le risque de paraître aux yeux de l’opinion publique comme une partie prenante dans le conflit, aux côtés des partisans de l’exclusion d’autrui au nom de la préservation des « spécificités », au lieu d’être une organisation neutre soucieuse de la défense des droits fondamentaux des citoyens, de tous les citoyens quelle que soit leur origine ou leur appartenance ethnique ou confessionnelle. Il y a tellement à faire dans le domaine du respect des droits de l’Homme en Algérie que de nombreux observateurs ne comprennent pas la tendance de la LADDH à se laisser entraîner dans des discours partisans, au demeurant fort discutables.