Mais quel crime a commis Saida Neghza pour mériter une levée de bouclier aussi haineuse ?

03.10.2023. Il y a quelques semaines, la présidente de la Confédération Générale des Entreprises Algériennes (CGEA), Saida Neghza, a été l’objet d’une campagne diffamatoire de grande ampleur, actionnée par l’agence de presse officielle et relayée par une presse aux ordres. Le papier de l’APS, rédigé sur ordre du conseiller communication à la présidence de la république, est tout simplement indigne de la corporation journalistique tant ses attaques grossières et injurieuses sont en contradiction flagrante avec l’éthique de la profession.

Saida Neghza est accusée par l’APS d’être « le porte-voix d’intérêts qu’elle est sensée, prétendument, combattre, ceux de l’ordre ancien, ceux d’une Issaba dont le sport favori, n’était pas la pratique du golf, mais détourner l’argent du peuple. Et qui revendiquent le droit d’acquérir des biens à l’étranger avec des transferts illicites, issus du même argent de la surfacturation ». L’APS reproche à Saida Neghza son « refus du changement, et cette obsession maladive des forces de l’argent sale qui ne veulent pas baisser les bras ».

Tour cela parce que Saida Neghza a osé s’adresser au président de la république pour lui faire part de ses inquiétudes et de ses critiques, ce qui est de son droit comme pour tout citoyen algérien. Les critiques exposées par Saida Neghza dans sa lettre ouverte datée du 5 septembre n’ont rien d’extraordinaire dans la mesure où elles résument de manière générale les points négatifs qui caractérisent la situation économique et sociale qui prévaut dans le pays. Comme présidente d’une organisation patronale, il est tout à fait naturel que Saida Neghza insiste sur les difficultés que rencontrent les entrepreneurs notamment en ce qui concerne les restrictions à l’import de certains intrants, restrictions administratives qui s’appliquent selon elle à certains entrepreneurs et pas à d’autres.

Il aurait fallu tout simplement lui répondre tranquillement arguments à l’appui. Mais non. Pour le directeur de l’APS, et pour le conseiller de la présidence qui a commandité cet article, les affaires du pays ne relèvent pas du débat public. Les entrepreneurs qui assistent au détournement des ressources du pays par un clan prédateur qui n’a rien à envier au clan de l’ex-FCE dirigé par Ali Haddad n’ont pas d’autre choix que de se taire et de se laisser faire. Comme les anciens hommes d’affaires de l’ex-FCE pouvaient compter sur leur entrée à la présidence squattée à l’époque par Said Bouteflika, les nouveaux prédateurs réunis au sein du CREA du dénommé Kamel Moula ont visiblement leurs parrains au sein de la présidence. C’est pourquoi ils se permettent d’attaquer impunément quiconque se met au travers de leur chemin parsemé de milliards indument gagnés.

Visiblement, les attaques colportées par l’APS n’ont pas fait trembler Saida Neghza et la La réponse de cette dernière ne s’est pas fait attendre. Saida Neghza commence par défier ses adversaires d’ apporter la moindre preuve qu’elle a bénéficié d’un quelconque crédit bancaire ou d’indus avantages. Par ailleurs, elle affirme que sa qualité de présidente de la CGEA ne souffre d’aucune contestation et sa réélection s’est faite par plébiscite, dans les règles de la loi.

Mais c’est sur le fond que la réponse de Saida Neghza laisse perplexe. « La CGEA est le seul patronat qui a refusé catégoriquement, en 2017, de s’associer à la fameuse rencontre de l’hôtel Aurassi, au cours duquel l’ancienne Issaba avait lancé « l’appel pour la destitution de Monsieur Abdelmadjid Tebboune des Fonctions de Chef du Gouvernement », malgré les menaces subies En dépit des menaces sur ma personne et des pressions lourdes dont elle a fait l’objet, la CGEA a été la seule Organisation patronale à refuser et dénoncer vigoureusement le fameux projet de Partenariat Public Privé (P.P.P) concocté pour dilapider l’outil de production public au profit de la Issaba. Fort heureusement, notre appel avait été écouté et ledit Projet avait été annulé par le défunt Président de la République », rappelle Saida Neghza.

A ses détracteurs qui se découvrent des penchants « patriotiques » pour cacher leur sordide campagne dictée par l’appât du gain, Saida Neghza signale que « La CGEA est l’unique organisation algérienne qui représente le patronat national au sein de l’Organisation Internationale du Travail/O.I.T, où elle détient un siège de membre titulaire de son Conseil d’Administration. Cette tribune est mise à profit pour défendre les intérêts supérieurs du pays et des rapports sont régulièrement adressés aux autorités compétentes »,

L’épisode de Saida Neghza est instructif à plus d’un titre. Loin de nous l’idée de prendre position pour une organisation patronale contre une autre. Nous ne prétendons pas que Saida Neghza a raison dans toutes ses critiques. Nous disons tout simplement qu’aucun média, aucun responsable, n’a le droit d’user de sa position pour s’attaquer à un autre Algérien. Les questions d’ordre économique et social qui engagent l’avenir des Algériens doivent être débattues publiquement sans contrainte ni violence. Par ailleurs, quelles que soient les qualités d’une organisation patronale, il n’est pas sain que sa proximité avec le pouvoir lui donne des privilèges indus par rapport à d’autres organisations patronales. Il est temps que le nouveau syndicat patronal, le CREA de Kamel Moula, puisse retrouver sa juste place aux côtés des autres organisations patronales. L’Algérie appartient à tous les Algériens. Il reste à espérer que le cri de Saida Neghza soit entendu en haut lieu. Avant qu’il ne soit trop tard.

Mustapha Senhadji