Makri annonce la victoire du MSP 72 heures avant la publication des résultats officiels !

Le président du MSP, Abderrazak Makri, vient de jeter un pavé dans la mare en déclarant sur sa page Facebook que son parti est arrivé en tête dans la plupart des circonscriptions électorales à l’intérieur et à l’extérieur du pays. « Cependant, nous avertissons qu’il y a de nombreuses tentatives pour changer le résultats en fonction des comportements antérieurs, ce qui aura des conséquences néfastes pour le pays et l’avenir du processus politique et électoral », a mis en garde le président du MSP. Il a appelé en conséquence le président de la République à «protéger la volonté du peuple, qui s’exprime effectivement, conformément à ce qu’il a promis».

Les observateurs se demandent comment M. Makri a pu prétendre à la victoire avec une telle assurance alors que le président de l’ Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) avait affirmé dans la soirée du samedi 12 juin qu’il fallait attendre 96 heures pour avoir les résultats définitifs. Pour les observateurs, les premières tendances apparues dans certaines circonscriptions montrent effectivement une avancée du MSP mais ces tendances demandent à être confirmées. Par ailleurs, même si le MSP arrivait en tête dans la majorité des circonscriptions (ce qui n’est pas évident) il ne pourrait compter que sur une majorité relative et devrait compter avec d’autres formations politiques à l’instar du FLN, du RND, du Front El Mostakbal et de son rival islamiste, le mouvement El Bina. Les listes indépendantes sur lesquelles le pouvoir a misé seront également fortement présentes au sein de la nouvelle assemblée, ce qui confirme la tendance vers un gouvernement de coalition au lendemain de l’annonce des résultats officiels des élections. Au demeurant, les informations parcellaires dont nous disposons jusqu’à maintenant montrent que le MSP est effectivement arrivé premier dans deux circonscriptions (El Oued, Annaba) alors qu’il doit partager la première place avec une autre formation dans plusieurs wilayas (Msila, Médéa, Jijel, Béchar, Laghouat, El Bayadh) et se contenter de la seconde place dans les circonscriptions de Chlef, Skikda, Sétif.

Au lendemain de la déclaration de M. Makri, le président de l’ANIE, Mohamed Charfi, a réagi en dénonçant ce qu’il a appelé une déclaration inopportune qui risque d’engendrer un climat de scepticisme et d’anarchie au sein de l’opinion publique. De leur côté, des observateurs ont relativisé cette déclaration de M. Makri en la mettant sur le compte de l’enthousiasme de cet homme politique échaudé par les pratiques passées du système. D’autres observateurs sont par contre déçus par cette déclaration qui révèle selon eux une immaturité politique regrettable de la part d’un dirigeant qui aspire à jouer les premiers rôles sur la scène politique algérienne. Pour ces observateurs, si on peut reprocher au pouvoir algérien tous les vices autoritaires imaginables, il n’en demeure pas moins que le pouvoir a tout a fait raison de se méfier de M. Makri qui fait preuve d’un double langage en alternant le chaud et le froid en fonction des circonstances. Si à la veille des élections, il avait montré un visage modéré, il semble que les premières tendances apparemment en faveur de son parti l’aient grisé au point de laisser apparaître une position des plus sectaires qui risque de braquer les autres partenaires politiques à un moment où la construction d’une Algérie nouvelle exige de la part de tout le monde un esprit d’ouverture et de compromis pour mettre en place un gouvernement pluraliste et compétent.

Mustapha Senhadji