Oran : des librairies désertées à la recherche de lecteurs
Les librairies d’Oran sont désertées par les lecteurs qui ne franchissent que rarement le seuil de ces commerces, jadis hauts lieux de savoir et de culture, de rencontres et d’échanges fructueux. Aujourd’hui, le nombre de ces librairies est nettement bas pour une ville ayant un statut de capitale de l’Ouest du pays, avec ses universités, ses centres de recherche et de milliers d’étudiants fréquentant les bancs des campus. « La fureur de lire » n’est plus à l’ordre du jour à Oran où, comme dans toutes les régions du pays, les moyens de communication modernes et Internet ont donné le coup de grâce au livre et à la lecture Actuellement, seule « la Librairie Internationale » organise parfois des rencontres avec des auteurs venus dédicacer leurs ouvrages et débattre de leurs contenus avec des universitaires, des hommes de culture et des journalistes. Les autres se contentent de ranger les livres sur des étalages et attendre un hypothétique client. Plusieurs gérants de librairies ont confirmé au correspondant de l’APS une situation qu’ils vivent âprement et au quotidien, à savoir la désertion du large public et le peu d’intérêt qu’il accorde à la lecture et au livre en général.
La gérante de la librairie « El Djaliss » explique cette réticence par le fait que les jeunes sont plus beaucoup « accrocs » des nouvelles technologies de la communication et de l’information qu’au livre dans sa version papier. Les prix affichés expliquent également cette situation. « De nos jours, acheter un livre à 1.000 dinars est un véritable sacrifice et grève sérieusement le budget familial », explique-t-elle. La gérante d’El Djaliss souligne que de nombreux jeunes entrent dans la librairie, repèrent l’ouvrage qui les intéresse, le feuillettent, l’examinent sous toutes les coutures mais à la vue du prix affiché, ils ressortent les mains vides. « Les livres sont chers. Certaines collections de théologie sont proposées jusqu’à 100.000 DA. C’est hors de portée du citoyen ordinaire », déplore un quinquagénaire rencontré sur place. Afin de contourner une situation plus que déplorable, la gérante de cette librairie a aménagé un coin de lecture à l’intention de ceux qui ne peuvent acquérir un ouvrage. Des tables et des chaises sont là pour « accueillir » les lecteurs d’un jour et leur permettre d’assouvir leur soif de lire.
La gérante de la librairie « Millénium » à Hai El Emir, au centre-ville, est catégorique. Son constat est sans ambigüité : « La nouvelle génération n’aime pas lire », avoue-t-elle. Pour elle, ceux qui franchissent le seuil de sa librairie ne viennent que pour chercher des manuels scolaires, des annales des examens du baccalauréat ou du BEM ou autres ouvrages parascolaires. La dame considère aussi que la jeune génération est beaucoup plus ouverte aux TIC et accède facilement aux ouvrages électroniques du fait de sa maitrise parfaite de l’outil informatique et des NTIC. Derrière son comptoir, la gérante constate chaque jour que seules les personnes d’un certain âge – des quinquagénaires et des retraités essentiellement – viennent consulter les ouvrages disponibles et achètent parfois un ouvrage ou deux comme c’est le cas pour des universitaires. Elle déplore les « ravages » du « copier-coller » auquel recourent les étudiants pour élaborer leurs exposés ou mémoires. « Ce n’est plus dans le contenu des livres que l’on puise l’information, mais dans Internet », constate-t-elle (APS)