20 avril : Quand le pouvoir et le MAK font chanter les Algériens
A l’occasion de la célébration du 36e anniversaire du « printemps berbère », le pouvoir et le MAK se livrent à un bras de fer dangereux en Kabylie. Le MAK a appelé ses partisans à organiser trois marches pour réclamer l’indépendance de la Kabylie. Le pouvoir par la bouche du premier ministre, Abdelmalek Sellal, a déclaré que « l’unité nationale est une ligne rouge ». Est-ce à dire que le pouvoir ira jusqu’à interdire par le recours à la force les marches du MAK ? Dans ce cas, pourquoi le pouvoir a-t-il laissé le MAK organiser ses meetings et ses manifestations les années précédentes ? Qu’est-ce qui explique que le pouvoir change de stratégie face au MAK ? Ce dernier s’est-il, entre-temps, développé au point de devenir un danger pour l’unité nationale ?
Malgré le discours virulent du MAK qui appelle ouvertement à la sécession de la Kabylie, le pouvoir semble choisir une stratégie soft pour éviter les dérapages d’une confrontation préjudiciable à la paix civile. Le pouvoir cherche ainsi à se réconcilier avec le « Printemps berbère » en faisant siennes la plupart des revendication de ce mouvement : officialisation de tamazight, intégration de l’enseignement de tamazight dans le système éducatif national, création d’une académie de la langue amazighe, promotion de la culture amazighe (littérature, théâtre, cinéma) sans parler de l’intégration d’anciens cadres du MCB au sein de l’Etat : l’actuel ministre de la jeunesse et des sports, El Hadi Ould Ali, est un ancien animateur du MCB dans les années 80, idem pour Amara Benyounes, l’ex-ministre du commerce).
Le pouvoir ne s’arrête pas là pour calmer l’aile dure du mouvement berbériste représenté par le MAK. Pour montrer sa « bonne volonté », il a chargé Mme Benghebrit et ses proches collaborateurs (dont certains sont des sympathisants déclarés du MCB) de s’attaquer à la politique d’arabisation via la mise en œuvre d’un programme dit de « modernisation » des programmes scolaires qui vise en fait à réintroduire le français comme langue principale d’enseignement tout en réservant une petite place à l’enseignement de l’arabe dialectal algérien et de tamazight, bref il s’agit d’appliquer en Algérie le modèle néocolonial en vigueur en Afrique noire. Dans cette stratégie de charme, le pouvoir algérien n’a pas hésité à encourager la promotion de nombreux cadres kabyles dans les appareils administratifs de l’Etat et dans les entreprises publiques sans parler du financement de nombreux milliardaires issus de cette région au risque de créer en retour un sentiment d’injustice dans les autres régions qui commence à s’exprimer ouvertement sur les réseaux sociaux. Il y aurait ainsi, selon les observateurs, comme une sorte de division du travail qui ne dit pas nom : les radicaux du MAK font du chantage au séparatisme pendant que leurs autres « cousins » profitent des donations d’un pouvoir qui croit que l’Algérie lui appartient. Entre-temps, la majorité des Algériens (y compris les habitants de la Kabylie) regardent amèrement le triste spectacle de la mise en coupe réglée du pays entre des groupes mafieux sans foi ni loi qui instrumentalisent le discours identitaire pour cacher leur gloutonnerie.