Un chercheur algérien lauréat du prix du Québec en sciences
Le chercheur algérien Karim Zaghib s’est vu attribuer le prix du Québec dénommé Prix Lionel-Boulet édition 2019 dans la catégorie scientifique pour ses travaux dans le domaine des batteries électriques. Le site officiel du prix du Québec n’a pas tari d’éloges pour présenter le lauréat de l’édition 2019 natif de Constantine. Contribuer à l’adoption des véhicules électriques partout sur la planète, c’est le défi de taille que Karim Zaghib relève avec inventivité depuis 30 ans. Le déclic s’est fait à l’adolescence, durant un embouteillage, alors que le jeune Karim éprouvait des difficultés respiratoires dues à la pollution. « Je ne peux pas changer le monde seul, mais je veux changer le monde des transports », a-t-il alors pensé. Cet événement marquera le début de son engagement dans le développement des matériaux de batteries. Après l’obtention d’un doctorat en électrochimie de l’Institut polytechnique de Grenoble et d’une habilitation à diriger les recherches (HDR) de l’Université Pierre et Marie Curie (Paris V) de Paris − le plus haut diplôme d’enseignement supérieur français −, Karim Zaghib poursuit sa carrière de chercheur à l’Osaka National Research Institute, au Japon. Durant trois ans, il développe une fine connaissance des matériaux de batteries lithium-ion.
En 1995, il se joint à l’Institut de recherche d’Hydro-Québec, fondé par Lionel Boulet, cet homme visionnaire qui a donné son nom au présent prix. Il y amorce notamment les travaux de la société d’État sur les matériaux de batteries. Depuis 2017, il est à la tête du Centre d’excellence en électrification des transports et en stockage d’énergie d’Hydro-Québec (CEETSE), qui réunit des scientifiques de haut calibre des quatre coins du monde.
Menés en collaboration avec des universités, des centres de recherche et des entreprises internationales, les travaux du Dr Zaghib ont fait d’Hydro-Québec la première entreprise au monde à utiliser le phosphate de fer lithié pour le stockage d’énergie de grande capacité. Karim Zaghib voit grand pour l’électrification des transports au Québec. Ses travaux de recherche actuels se concentrent sur le développement d’une batterie tout solide qui promet de répondre aux besoins de l’industrie des véhicules électriques. Selon lui, le Québec regroupe toute l’expertise nécessaire à la fabrication à grande échelle des batteries. « Tout ce qui manque à l’écosystème, c’est une capacité de transformation des matières premières », affirme-t-il. Le Dr Zaghib souhaite contribuer au développement de cet écosystème par la création de coentreprises. À ce sujet, il mentionne la coentreprise Estallion, cofondée en 2014 par Sony et Hydro-Québec, pour le développement de systèmes de stockage d’énergie. « C’est un modèle d’affaires qu’on souhaite répéter avec les petites et les moyennes entreprises », souligne-t-il. En 2017, Karim Zaghib a d’ailleurs reçu la récompense Personnalité d’affaires Québec-Japon, qui couronnait ses nombreux partenariats d’affaires dans le domaine des matériaux de batteries avec ce pays. Parmi ses fructueuses collaborations à l’international, Karim Zaghib est aussi président de SCE France, une filiale française d’Hydro-Québec et du Conseil régional d’Aquitaine, qui soutient le CEETSE dans ses travaux de recherche.
Citoyen du monde, il possède les nationalités algérienne, française et canadienne. Le chercheur exprime une profonde gratitude envers sa société d’accueil pour sa qualité de vie, sa situation géopolitique stable, l’excellence de son réseau universitaire, la gratuité de l’éducation et de la santé, ses grands espaces… Autant d’atouts que le chercheur émérite vante pour attirer des sommités mondiales dans son équipe. La contribution de Karim Zaghib à la recherche sur les matériaux de batteries est remarquable. Il a participé à plus de 550 brevets, 60 licences, 425 publications (avec un indice de Hirsch de 65, ce qui signifie que l’influence du scientifique dans son domaine, selon le nombre de citations de ses publications, est très élevée) et est l’auteur ou le coauteur de 22 livres, dont Lithium Batteries : Science and Technology (2016), High Performance of Li-Ion and Li-Polymer Batteries (2004) et Lithium and Li-ion Batteries (2003). Les talents de communicateur de ce conférencier reconnu ont été mis en valeur à plusieurs centaines d’occasions. Le Dr Zaghib a été nommé trois fois parmi les 3 300 scientifiques les plus influents au monde selon Clarivate Analytics pour les retombées exceptionnelles de ses recherches. Il a reçu plusieurs autres prix et distinctions, dont le titre de Fellow de l’Académie canadienne du génie (2017), le International Battery Association Technology Award (2017), le titre de Fellow de l’Electrochemical Society (2011) et le IBA Research Award (2010). C’est avec fierté et discernement que Karim Zaghib accepte le prix Lionel-Boulet, qui récompense le génie inventif, l’innovation et la persévérance. Cette distinction le motive à poursuivre ses travaux dans l’espoir de générer de nouveaux emplois au Québec et de faire rayonner l’électrification des transports partout sur la planète. Si on ne peut qu’exprimer notre fierté pour les réalisations de ce compatriote et partager sa joie et celle de tous les Algériens à cette occasion, nous ne pouvons hélas cacher notre amertume face à l’incapacité de notre pays à bénéficier de ses cerveaux expatriés faute d’avoir investi dans les conditions favorables à la recherche-développement et à l’épanouissement des compétences. Espérons que le changement en cours grâce à la mobilisation de la jeunesse algérienne puisse ouvrir de nouvelles perspectives pour que dans quelques années l’Algérie soit capable de mettre à contribution toutes ses compétences pour un développement durable et solidaire.
Source : le site officiel du prix du Québec Lionel-Boulet.